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Intervention au Sénat sur la politique de l’immigration

Il y a 6 mois, le 13 décembre 2022

Par Pierre Laurent

Monsieur le Président, Madame la Première ministre, Messieurs les Ministres, Chers collègues, Le débat d’aujourd’hui est censé ouvrir celui que nous aurons début 2023, sur un nouveau texte de loi sur l’immigration. Ce sera le vingt-neuvième en 40 ans. En prélude à ce projet de loi, vous avez publié le 17 novembre une circulaire mettant […]

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Monsieur le Président,
Madame la Première ministre,
Messieurs les Ministres,
Chers collègues,

Le débat d’aujourd’hui est censé ouvrir celui que nous aurons début 2023, sur un nouveau texte de loi sur l’immigration. Ce sera le vingt-neuvième en 40 ans.

En prélude à ce projet de loi, vous avez publié le 17 novembre une circulaire mettant gravement en cause le droit inconditionnel à l’hébergement d’urgence pour les étrangers. Les structures d’accueil et les associations sont vent debout contre cette circulaire.
La discussion commence donc très mal. Si elle partait sur de telles bases, votre texte de loi pourrait être un nouvel appel d’air à tous les débordements, tous les fantasmes sur la submersion migratoire, sur les assimilations immigration/délinquance qui pourrissent le débat public depuis tant d’années. L’hystérie soulevée par l’arrivée de l’Ocean Viking en est le dernier exemple.

Pourrions-nous enfin débattre sérieusement et sereinement ? Les migrations sont un enjeu essentiel du monde et de l’époque actuelle. Depuis toujours la France, comme d’autres grandes démocraties, s’est construite en accueillant des migrants. Pendant longtemps c’est cela aussi qui a contribué à faire de la France, aux yeux des peuples du monde, la « patrie des Droits de l’Homme ».

Mais rompant avec cette histoire au fil des lois régressives, nous sommes devenus un des pays les plus restrictifs d’Europe. Car loin des fantasmes, c’est cela la réalité des chiffres.

Nous vivons une grave crise de l’accueil et un traitement de plus en plus dégradant des migrants en France et en Europe, un traitement indigne des droits humains.

Oui il faut débattre, car les causes des migrations sont multiples. Guerres, pauvreté extrême, violences faites aux femmes, répression des droits humains, catastrophes climatiques jettent des millions de femmes, d’hommes et d’enfants sur les routes de l’exil.
La mondialisation aussi a changé beaucoup de choses. Car les habitants de la planète, où qu’ils vivent, considèrent que les inégalités mondiales et le deux poids -deux mesures dans le traitement de la vie humaine ne sont plus acceptables.

Agissons-nous contre ces inégalités et ces insécurités mondiales ? Bien au contraire, la politique des pays les plus riches, comme le nôtre, ne cesse de les renforcer. Citons quelques exemples :
– les opérations militaires à répétition qui déstabilisent nombre d’États du Sud et du Proche-Orient ;
– les ajustements structurels et traités de libre-échange qui laissent exsangues les services publics de ces pays, assignent leurs économies à l’extraversion contre leurs besoins de développement interne ;
– le contrôle monétaire que nous continuons d’exercer sur les pays d’Afrique de l’Ouest via l’ex-franc CFA, qui les empêche d’avoir les moyens de financer leur développement ;
– les atermoiements face à la crise climatique, dont témoigne l’échec de la COP 27…

C’est de tout cela dont nous devrions parler, si nous voulons débattre sérieusement des migrations. Mais nous n’allons pas en parler, et certains nous rediront avec des mots nouveaux « la France ne peut pas accueillir toute la misère du monde ».

Mais chaque fois que des solutions concrètes sont mises sur la table pour traiter les causes réelles des désordres mondiaux et des conséquences qu’ils entraînent, toutes ces idées sont balayées d’un revers de main.

L’arrivée des réfugiés fuyant la guerre en Syrie aurait pu signer une nouvelle prise de conscience en Europe. Angela Merkel avait déclaré courageusement en 2016 : « Nous y arriverons ». Ce fut l’échec, et le retour des murs et des barbelés. En 2021,après la prise de Kaboul par les talibans, Emmanuel Macron ne trouvait plus qu’à s’inquiéter face aux « flux migratoires irréguliers ».

L’Europe a tourné le dos à ses devoirs d’accueil et de solidarité humaine. La présidence française de l’UE a passé son tour sur le Pacte asile et immigration. Aujourd’hui, le non-respect des clés de répartition solidaires à l’échelle européenne, un temps évoquées, associé à l’absurde règlement de Dublin, génère souffrance et indignité sur le continent.
Nous vivons avec la multiplication des camps d’exilés, des violences condamnables aux frontières, des dizaines de milliers de morts en Méditerranée, dans la Manche ou sur la route des Balkans.

L’Europe n’a plus qu’une obsession, externaliser le traitement des migrants et marchander avec les pays de départ les reconduites aux frontières, plutôt que de considérer ces États comme des partenaires pour la coopération et le développement.

Ces politiques, qui n’arrêteront rien tant les causes des migrations sont profondes, ne font que favoriser les contournements et les migrations irrégulières, quand il faudrait au contraire travailler à des voies légales et sécurisées de migrations.
Ces voies légales et sécurisées sont possibles, car sinon comment expliquer que l’Europe puisse accueillir, à juste titre d’ailleurs, plusieurs millions d’Ukrainiens ?
Un Afghan fuyant les Talibans, une Nigériane fuyant un mariage forcé ou l’excision, un Congolais fuyant les massacres, une famille du Pakistan fuyant les inondations, valent-ils moins à nos yeux ?

Mais de tout cela, nous ne débattrons probablement pas. Votre projet, pour ce que nous en savons puisque nous n’avons pas le texte, semble vouloir se concentrer sur deux sujets, présentés comme les deux faces d’une même pièce : la régularisation par le travail pour les uns, l’accélération des expulsions pour les autres. Vous nous demandez donc de nous concentrer sur la situation de ceux qui sont déjà entrés sur notre sol. Sur ces deux sujets, quelques remarques.

Sur la question du travail. Vous connaissez notre position, elle est claire. Nous sommes pour la régularisation de tous ceux qui travaillent. Les grèves de sans-papiers ont montré clairement que des filières entières emploient ces travailleurs sans les déclarer au vu et au su de tous. Ils n’usurpent le travail de personne, car nous peinons aujourd’hui à recruter. Ils travaillent pour notre pays et sont pourtant maintenus dans une situation de vulnérabilité insupportable.
Nous ne voulons pas de quotas, et nous serons vigilants sur cette affaire de « liste des métiers en tension ». Le Gouvernement serait donc prêt à accueillir des étrangers mais à une condition, leur utilité. Pour nous, il ne doit pas s’agir de régulariser des pratiques d’exploitation patronales. Il s’agit de régulariser des femmes et des hommes, qui par leur travail peuvent enrichir notre pays et sécuriser leur vie.

Nous sommes favorables à la suppression du délai de carence afin de permettre aux demandeurs d’asile de travailler dès leurs six premiers mois en France.

Nous plaidons pour les travailleurs pour une régularisation de plein droit, non soumise à la durée précaire des contrats, avec un titre de séjour d’une durée minimale de deux ans, pour permettre à ces salariés de sécuriser leur vie et leur installation.

Le ministre de l’Intérieur M. Darmanin évoque aussi, cela a été rappelé ce soir, l’exigence de réussir un test de français pour l’obtention d’un titre de séjour pluriannuel. Évidemment, personne ne peut être contre que les étrangers en France qui viennent travailler chez nous apprennent le français. Mais nous serons attentifs là aussi pour que ce ne soit pas un sujet de discrimination. Et d’ailleurs, combien de Français aux origines immigrées ont mis des années avant de maîtriser leur langue nationale, leur langue d’adoption ?

Si au contraire, le titre que vous envisagiez pour les travailleurs sans-papiers ne courait que pour la stricte durée du contrat de travail, sa fin vaudrait alors OQTF et expulsion. Le cycle infernal serait perpétré.
Nous nous inquiétons donc de l’abus de vulnérabilité découlant de la dépendance économique et administrative du travailleur à l’égard de son employeur.

Quant au second volet, le renforcement des OQTF, que vous présentez faussement comme une contrepartie, le risque est grand de prendre de plus en plus de largesses avec le respect du droit.
Vous voulez qu’une OQTF vale expulsion. On peut aisément supposer qu’une telle décision sera sévèrement réprouvée par la Cour Européenne des Droits de l’Homme, car portant atteinte au droit à un recours effectif, garanti par l’article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme.

Du point de vue procédural, vous affirmez la volonté de généraliser le juge unique à la Cour nationale du droit d’asile. Vous risquez de déshumaniser les procédures administratives, avec un risque de rejets systématiques.
Cette déshumanisation passera aussi par la généralisation des audiences en vidéo que vous envisagez. Cet éloignement a sa symbolique car la présence, le corps et ses marques, la souffrance endurée par les migrants, n’est pas perceptible de la même façon dans une procédure menée en présentiel.

Voilà en quelques mots, Mesdames et Messieurs les Ministres, dans quel état d’esprit et avec quels principes nous aborderons le débat à venir sur votre projet de loi.

 

Seul le prononcé fait foi

Tribune interparlementaire : “Nous ouvrons le débat parlementaire sur la dissuasion nucléaire”

Il y a 6 mois, le

Par Pierre Laurent

Il y a quelques jours, j’ai signé avec Jean-Paul Lecoq, Député et Mounir Satouri, Député européen, cette tribune relançant le débat sur l’urgence d’un désarmement nucléaire multilatéral !

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Tribune interparlementaire : “Nous ouvrons le débat parlementaire sur la dissuasion nucléaire”

 

– Jean-Paul LECOQ, député de Seine-Maritime, Vice-président de la Commission des Affaires étrangères
– Pierre LAURENT, Sénateur de Paris, Vice-président de la Commission des Affaires étrangères, de la Défense et des Forces armées
– Mounir SATOURI, Député européen français, membre de la Commission des Affaires Étrangères et de la Sous-commission sur la sécurité et la défense.

 

En présentant la nouvelle Revue nationale stratégique (RNS), le président de la République a écarté tous questionnements sur ce qu’il nomme la « dorsale de notre sécurité » ; soit la politique de dissuasion nucléaire. Pourtant, l’invasion illégale de l’Ukraine par la Russie a renforcé et fait naître de nouvelles interrogations sur la pertinence de ce modèle de défense. Vouloir les ignorer, revient à poursuivre une politique d’une « non histoire possible » comme l’écrivait le philosophe Paul Ricœur. Dans une volonté d’interpellation et d’ouverture du débat, nous avons lancé une initiative inédite dans un État doté d’armes nucléaires : créer un cercle informel de parlementaires pour engager des travaux de réflexion sur le nucléaire militaire et notamment sur le Traité d’interdiction des armes nucléaires. Nous pensons qu’il est effectivement urgent de reprendre l’initiative sur le désarmement nucléaire multilatéral.

La guerre en Ukraine fait peser des menaces nouvelles sur l’utilisation potentielle des arsenaux nucléaires. Si nous sommes en accord avec le constat dressé par le Président Macron sur une « désinhibition de la violence », nous refusons d’appliquer des recettes qui n’ont fait que l’alimenter. Le président Macron parle d’« une révolution copernicienne du mode de conception des conflits, de notre géopolitique ». Mais cette « révolution » nécessite précisément d’interroger la politique de dissuasion, en particulier sur trois points.

Premièrement, la dissuasion nucléaire est confrontée à une crise de perception qui ne peut-être ignorée. Ses partisans affirment qu’elle aurait empêché la Russie d’attaquer un territoire de l’OTAN. Pour les acteurs du désarmement, la dissuasion a prouvé qu’elle permettait de faire la guerre, la Russie utilisant la menace nucléaire pour protéger son acte d’agression. Les forces nucléaires de l’OTAN, ou la sortie de 3 SNLE français en mer n’ont d’ailleurs pas dissuadé le Président Poutine de poursuivre ses exactions en Ukraine. Ces perceptions différentes de la dissuasion devraient objectivement nous interpeller. Enfin, il est surprenant de voir un président promouvoir cette “dissuasion” si ardemment, alors même qu’il vient d’entériner la déclaration du G20 (Bali, 15 novembre) qui déclare que « l’utilisation ou la menace d’utilisation [soit la dissuasion] d’armes nucléaires est inadmissible ».

L’effort budgétaire pour la dissuasion souhaité par la RNS, qui devrait s’inscrire dans la future Loi de Programmation Militaire (LPM), interroge sur la capacité de financer l’ensemble des priorités énoncées par le Président Macron. La future LPM envisage d’engager plus de 400 milliards pour soutenir un effort de guerre élargi et de haute intensité. Or les investissements massifs de plusieurs dizaines de milliards nécessaires au processus de renouvellement de la dissuasion – qui prendra fin en 2050 avec la livraison du dernier sous-marin nucléaire lanceur d’engins (SNLE-3G) – auront un impact direct sur les moyens budgétaires consacrés aux forces conventionnelles.

La volonté de pérenniser la dissuasion revient à tourner le dos à l’ensemble de l’architecture internationale de sécurité ; donc à rendre notre monde plus instable. L’insécurité mondiale qu’occasionnent les arsenaux nucléaires est reflétée par la mobilisation d’États du monde entier autour du Traité sur l’interdiction des armes nucléaires (TIAN). Ce Traité, qui compte 68 États parties et 91 signataires, s’impose de plus en plus dans tous les forums, onusiens comme interparlementaires, et ce malgré son rejet aujourd’hui par la France, qui fait front commun avec la Russie, la Chine, le Royaume-Uni et les États-Unis. Il complète et renforce le Traité de non-prolifération nucléaire (TNP), que la France d’ailleurs ne respecte pas au vu des engagements souscrits en 1992, 1995, 2000 et en 2010. Ainsi, le Président prétend à Toulon que la France « assume ses responsabilités » et « contribue, en partenaire fiable et solidaire, à la préservation du multilatéralisme et du droit international ». Or en matière de désarmement, force est de constater que le compte n’y est pas.

Nous regrettons une nouvelle fois de voir que le Président de la République nous impose ainsi sa méthode, dans laquelle le rôle des parlementaires serait simplement de valider des lignes de crédits. Nous pensons nécessaire de débattre librement de tout, de façon démocratique et sans pression excessive de temps, pour assurer aux populations françaises et européennes actuelles et futures une véritable sécurité. Notre sécurité mérite mieux que de s’appuyer sur des affirmations gravées dans le marbre de la Guerre froide.

Dans l’objectif d’alimenter les nouvelles réflexions, nous avons décidé de créer un « Cercle interparlementaire sur le désarmement nucléaire et l’interdiction des armes nucléaires ». Son objectif est « de rencontrer et d’interagir avec les acteurs du désarmement et de la non-prolifération nucléaires sur les questions notamment relatives au Traité sur l’interdiction des armes nucléaires ». Ce groupe, qui est ouvert à tous les parlementaires, permettra dans la législature qui s’ouvre d’engager librement de nouvelles réflexions, de poursuivre les échanges avec la Campagne internationale pour abolir les armes nucléaires (ICAN), des chercheurs universitaires, des centres de recherche et les acteurs de la dissuasion. La France doit agir en responsabilité face à ces armes de destruction massive, et nous, parlementaires, avons la responsabilité de nous en assurer.

 

Une tribune à retrouver sur le site d’ICAN France : http://icanfrance.org/tribune-nous-ouvrons-le-debat-parlementaire-sur-la-dissuasion-nucleaire/

Discours au Congrès du Parti de la Gauche Européenne

Il y a 6 mois, le 10 décembre 2022

Par Pierre Laurent

Ce week-end se tient le congrès du Parti de la Gauche Européenne, à l’occasion duquel je rends mon mandat de Vice-président en charge de l’organisation du Forum européen des forces de gauche, vertes et progressistes. J’y ai prononcé un discours sur l’avenir du Forum et plus largement, les perspectives d’union et de travail conjoint entre les forces progressistes du continent.

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Cher.es camarades,

Il y a six ans à Berlin, le congrès du PGE décidait de lancer une initiative inédite dans le paysage politique européen : le forum européen des forces de gauche, vertes et progressistes.

Le Forum de Sao Paulo, qui rassemble les forces de gauche et progressistes d’Amérique latine, et avec lequel le PGE a tissé des liens de travail étroits, avait inspiré notre décision. Il ne s’agissait pas de copier un modèle. Il s’agissait de créer dans les conditions propres à l’Europe un nouvel espace d’échange politique capable de générer des convergences, et progressivement des fronts communs d’action communs entre toutes les familles de gauche, vertes et progressistes d’Europe pour faire face aux politiques néo-libérales, aux forces de droite, et désormais et de plus en plus aux forces d’extrême-droite.

En ligne de mire, notre objectif est clair : non seulement résister à ces forces réactionnaires, mais surtout créer les conditions d’inverser progressivement les rapports de force en Europe en faveur de politiques sociales, économiques et financières, écologiques, féministes, démocratiques, de paix et de solidarité. Six ans plus tard, nous pouvons être fiers du chemin parcouru.

Nous venons de tenir, grâce aux camarades de Syriza, à Athènes les 21, 22 et 23 octobre une 6ème édition réussie et prometteuse du Forum européen. Nous avons tenu chaque année depuis 6 ans une édition du Forum à Marseille, à Bilbao, à Bruxelles, à Athènes, et deux fois en ligne ou en format hybride, car nous avons réussi à assurer la continuité du Forum pendant la pandémie. A chaque fois, plusieurs centaines de participants, venus de plus de 130 organisations politiques, syndicales, de mouvements sociaux et d’ONG.

Nous avons tâtonné, expérimenté, amélioré le Forum grâce à des réunions associant largement et plusieurs fois par an les organisations participantes. Au fil du temps, un format original du Forum s’est installé, avec des séances plénières thématiques permettant la confrontation des points de vue pluralistes qui composent le Forum, 4 Assemblées des femmes, des syndicalistes, des jeunes, de la culture pilotées de manière autonome, des ateliers thématiques coorganisés par ceux qui en proposent le thème, et à chaque édition l’adoption d’une déclaration finale et depuis trois ans d’un plan d’action pour l’année à venir. Vous avez dans vos documents ces textes adoptés au Forum d’Athènes.

Aujourd’hui, le Forum est une base sérieuse et crédible de travail pour toutes les organisations qui l’ont fréquentée au moins une fois. Ce n’était pas gagné d’avance. C’est un acquis précieux et je veux saluer toutes celles et ceux qui ont permis ce premier très grand résultat, en investissant beaucoup de temps dans la réussite de chaque édition, et singulièrement les membres de la présidence et du secrétariat politique du PGE qui, à mes côtés, nous représentaient dans le groupe de coordination pluraliste du Forum ( José Luis, Maïté, Natasa, Attila), et l’équipe du bureau de Bruxelles, Lena et tous les autres, sans lesquels la réussite organisationnelle du Forum serait impossible. Vous pouvez les applaudir.

Mais je veux vous livrer une vision lucide. Nous ne sommes pas au bout du chemin. Nous sommes en chemin et c’est maintenant, si nous y consacrons l’énergie
suffisante, que le Forum va pouvoir donner sa pleine mesure pour nous aider à changer les rapports de force en Europe. Nous voulons que le Forum associe toutes les forces de gauche en Europe, celles membres ou observateurs du PGE et toutes celles qui n’y sont pas. Nous progressons dans cette voie grâce à un partenariat solide et renouvelé avec le groupe parlementaire de la Gauche au Parlement, et avec la fondation Transform, qui contribuent par leur participation active à élargir la surface du Forum. Pour ne prendre qu’un exemple significatif, je salue la participation à Athènes de Mary Lou MacDonald, président du Sinn Fein en Irlande. Nous voulons le dialogue avec les forces vertes. Nous progressons là aussi, et je veux saluer l’engagement constant dans la coordination du Forum d’Ernest Urtasun, des Verts catalans, vice-président du groupe des Verts au Parlement européen.

Nous sommes encore loin du compte, car la famille verte européenne est très diverse, allant de forces travaillant avec la gauche à des forces ouvertement associées à des conceptions de capitalisme vert, très compatible avec la droite libérale. Mais nous devons persévérer, car l’avenir écologique de l’Europe est une question majeure indissociable de la transformation sociale et économique du projet européen. L’avenir appartient aux forces qui seront capables de lier luttes pour le climat et la biodiversité et luttes pour changer les règles capitalistes du système productif et financier, car c’est la condition pour réussir une transition juste et solidaire. Donc, oui les forces vertes sont les bienvenues au Forum européen ! Oui, la jeunesse qui se bat pour le
climat sur tout le continent est la bienvenue au Forum !

Nous voulons travailler avec les forces socialistes et progressistes qui comprennent combien le social-libéralisme qui a cogéré l’Europe libérale avec la droite était une grave impasse. Nous progressons là aussi grâce au travail commun avec les membres du Left Progressive Caucus du Parlement européen, grâce à la venue de Jeremy Corbyn il y a deux ans, de représentants du PS français, engagés dans l’alliance de la Nouvelle Union Populaire en France, ou de l’eurodéputé allemand Udo Bollman à Athènes. Nous voulons là aussi élargir encore car les urgences de l’époque et les menaces d’extrême-droite dans toute l’Europe nous imposent la construction de fronts de lutte toujours plus larges.

Nous voulons avec les Assemblées des femmes, des syndicalistes, des jeunes et de la culture dans le Forum élargir le travail commun entre les forces politiques de gauche, vertes et progressistes, et tous les mouvements sociaux qui génèrent la révolution féministe en cours, les luttes syndicales dans toute l’Europe, les mouvements de jeunes et ceux de la culture. Je veux souligner la place prise par l’Assemblée des femmes, par celle des syndicalistes avec la participation de dirigeants de premier plan de la confédération européenne des syndicats et de grandes fédérations syndicales européennes dont Esther Lynch cette année à Athènes, avec laquelle nous avons convenu d’échanger sur le travail commun possible dès après le congrès de la CES en mai prochain. Je veux saluer le travail patient pour installer l’Assemblée des jeunes et les débuts prometteurs de l’Assemblée de la culture. Je veux dire aussi notre volonté d’installer le travail dans la durée avec les fondations européennes verte et socialiste grâce à l’engagement de Transform. Oui, le Forum est bien en train de devenir un espace utile de co-élaborations communes pour des bifurcations de progrès, de justice et de paix en Europe.

Le Forum d’Athènes, qui a consacré de nombreuses heures de discussion, aux enjeux de la paix et de la guerre, a adopté cinq axes dans son plan d’action pour amplifier la bataille féministe en Europe, pour appuyer les luttes en faveur de la construction de droits sociaux capables d’unir les travailleurs européens et d’engager un autre type de développement , pour promouvoir une transition climatique juste, pour construire en Europe un mouvement de paix capable de combattre la militarisation et le surarmement en cours en Europe, et pour construire une bataille culturelle et idéologique d’ampleur à l’échelle de l’Europe contre l’extrême-droite néo-fasciste.

L’objectif pour 2023 est que dans la préparation de la 7ème édition du Forum nous soyons en mesure de mettre en œuvre le plan d’action. La 7ème édition du Forum, dont le lieu sera décidé en début d’année prochaine, se tiendra à l’automne prochain. Ce sera six mois avant les prochaines élections européennes. Le Forum n’a pas vocation, compte tenu de sa grande diversité, à discuter stratégies électorales. Il reviendra aux partis de d’élaborer ces stratégies, mais je crois que le Forum peut trouver une autre utilité. Je pense , c’est en tous cas une opinion personnelle, que le Forum pourrait travailler à élaborer en vue de ces échéances des objectifs concrets de transformation sociale, écologique, économique, féministe, démocratique, de paix de l’Europe versés au pot commun des forces de gauche, vertes et progressistes de toute l’Europe. Nous pourrions le faire sur des objectifs concrets : le remplacement du pacte budgétaire par de nouvelles règles, la transformation écologique, industrielle, agricole, énergétique, la paix, des droits des femmes, les migrations… Aux forces politiques d’en faire alors leur miel comme elles l’entendront. Voilà un bel objectif que l’on pourrait suggérer au prochain Forum, car toutes les décisions du Forum , je le répète, sont prises par des instances de coordination pluralistes, représentatives des forces diverses qui s’y engagent, et nous y tenons.

Permettez-moi de conclure par un mot personnel. J’ai présidé le PGE pendant six ans, puis, comme vice-président ces six dernières années, j’ai assuré grâce à votre confiance le lancement et la coordination du Forum, aux côtés de mon ami José Luis Centella ces dernières années et de Lena Chapiro au bureau de Bruxelles. D’autres camarades vont assurer à l’issue de notre congrès ces responsabilités. Je quitte ces responsabilités, je sais que mon parti, le PCF poursuivra l’engagement entrepris au service de nos efforts communs, et je me tiendrai disponible pour transmettre cette expérience. Je veux vous remercier de tout ce que cette aventure militante m’a apporté en souhaitant le meilleur pour l’avenir du PGE et l’avenir du Forum européen. Merci à tous !

 

Seul le prononcé fait foi

Utilisation d’armes chimiques par l’armée turque : une enquête internationale est nécessaire

Il y a 6 mois, le 30 novembre 2022

Par Pierre Laurent

La Turquie est accusée d’avoir utilisé des armes chimiques dans le nord de l’Irak. Une enquête internationale indépendante doit pouvoir faire la lumière à ce sujet : c’est l’objet de la Question Écrite que je viens d’adresser à la Ministre des Affaires étrangères.

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M. Pierre Laurent attire l’attention de Mme la ministre de l’Europe et des affaires étrangères sur des allégations de plus en plus nombreuses au sujet d’une utilisation d’armes chimiques par l’armée turque dans le nord de l’Irak.

D’ores et déjà ces accusations ont été jugées assez sérieuses pour diligenter une enquête in situ par l’association internationale des médecins pour la prévention de la guerre nucléaire (IPPNW). Cette enquête s’est heurtée à des entraves sur le terrain.

Au vu de ces difficultés et de la gravité des allégations, il lui demande ce qu’elle compte faire pour que la France saisisse l’organisation des Nations unies (ONU) afin de déclencher une enquête internationale.

 

Question écrite n° 04167 : https://senateurscrce.fr/activite-des-senateurs/les-questions-au-gouvernement/les-questions-ecrites/article/une-enquete-internationale-est-necessaire

Appel en faveur de la levée de la suspension de l’Aide publique au développement en faveur du peuple malien

Il y a 7 mois, le 24 novembre 2022

Par Pierre Laurent

Suite à la situation engendrée par la suspension de l’Aide Publique au Développement française (APD) en faveur du peuple malien, j’ai initié un appel avec des élus et personnalités du Mali, du Burkina Faso, du Sénégal, de Côte d’Ivoire et de France. Cet appel demande l’annulation de cette mesure et appelle à un dialogue entre le Mali et la France respectueux et bénéfique à ces deux peuples.

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La suspension des financements de l’Aide publique au développement (APD) en direction du Mali, y compris de ceux qui transitent par des organisations humanitaires, est une décision qui scandalise à juste titre le monde associatif en France et au Mali. Tous se sont adressés au chef de l’État français en ce sens en soulignant, l’impact direct très négatif pour les populations.


Cette décision du pouvoir français intervient dans un contexte dans lequel 7,5 millions de personnes au Mali ont besoin d’aide humanitaire, soit plus de 35 % de la population malienne, et alors que ce pays est en 184ème position sur l’indice de développement humain (IDH).


Cette décision alimente une dangereuse escalade entre les deux pays.


Avec cette décision, le pouvoir français lie les organisations humanitaires de manière évidente et directe aux turpitudes et variations de la politique étrangère de la France et contribue ainsi à  les discréditer au Mali et dans la sous-région. En réponse à cette décision du pouvoir français le pouvoir malien vient d’interdire les ONG opérant au Mali sur financement ou avec l’appui matériel ou technique de la France. Le peuple malien fait ainsi les frais des différends en matière de gestion sécuritaire entre les pouvoirs français et malien.


Pour nous, demander l’annulation de la suspension des financements de l’APD n’est pas défendre le statu quo. Nous pensons que la France devrait remédier à la faiblesse des ambitions budgétaires en matière d’APD et atteindre au plus vite l’objectif contraignant des 0,7 % du Revenu National Brut (RNB), fixé par l’Organisation des Nations Unies (ONU) il y a cinquante ans. Nous pensons surtout qu’il convient de changer en profondeur la philosophie de l’aide pour la tourner résolument vers la construction des bases solides d’un développement propre des pays destinataires, la dégager de toutes les logiques de pillage qui persistent encore largement et faire en sorte qu’elle ne s’évapore pas dans des frais de fonctionnement au détriment des populations qui en ont besoin. Il faut un suivi citoyen renforcé des projets. L’approche de la coopération française vis-à-vis de l’Afrique devrait s’appuyer sur celle développée par Thomas Sankara qui appelait à « encourager l’aide qui nous aide à nous passer de l’aide ».


Des fonds importants de cette aide devraient également être consacrés pour appuyer la construction de recettes fiscales pérennes et solides pour les pays bénéficiaires, comme le préconisent de plus en plus d’acteurs dont la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (CNUCED). II s’agit d’aller à l’encontre de l’organisation économique internationale actuelle, qui alimente un nivellement par le bas, notamment dans les pays en développement, à travers des législations qui distribuent des cadeaux fiscaux à tout va et particulièrement aux multinationales.

 

Pour l’heure, nous appelons les autorités françaises à la pondération en leur demandant d’agir en faveur du développement économique et social, de la paix et des échanges entre les peuples, et par conséquent de renoncer à la suspension des financements de l’APD en faveur du peuple malien. Le dialogue pourrait ainsi reprendre entre les autorités maliennes et les ONG précitées pour relancer au plus vite tous les projets utiles au peuple malien. Au-delà, la France et le Mali doivent se mettre autour d’une table pour refonder une relation respectueuse et bénéfique à leurs deux peuples.

 

– Pierre Laurent, Sénateur de Paris, Vice-Président de la Commission des Affaires Étrangères, de la Défense et des Forces Armées du Sénat
– Dr Babacar Diop, Maire de Thiès (Sénégal)
– Jean-Paul Lecoq, Député de Seine-Maritime, Vice-Président de la Commission des Affaires étrangères de l’Assemblée Nationale
– Michel Gbagbo, universitaire, Député de Youpougon (Côte d’Ivoire)
– Pascal Savoldelli, Sénateur du Val-de-Marne
– Benewende Stanislas Sankara, Président de l’UNIR/Parti sankariste, ancien Ministre et ancien Vice-Président de l’Assemblée Nationale du Burkina Faso
– Francis Wurtz, Député européen honoraire, ancien Vice-Président de la commission du développement au Parlement européen
– Issa N’Diaye, ancien Ministre du Mali
– Lamine Camara, Président de la Coordination des élus français d’origine malienne (CÉFOM), Conseiller Régional d’Ile-de-France
– Djeneba Keïta, Adjointe au Maire de Montreuil, Vice-Présidente de la Métropole du Grand Paris
– Halima Menhoudj, Adjointe au Maire de Montreuil en charge de la Coopération décentralisée, de la solidarité internationale et des populations migrantes, Présidente du Groupe-Pays Mali de Cités Unies France
– Félix Atchadé, Collectif Afrique du Parti Communiste Français

Protection des civils contre l’utilisation d’armes explosives en zones peuplées : l’appel à l’action parlementaire !

Il y a 7 mois, le 18 novembre 2022

Par Pierre Laurent

Ce vendredi 18 novembre à Dublin, 80 États ont officiellement adopté un accord international historique visant à mieux protéger les civils de l’utilisation des armes explosives en zones peuplées. Cette avancée historique est le fruit d’années de travail des associations, des élus et des citoyens. Afin de s’assurer de la réelle mise en œuvre de cette déclaration dans les années à venir, les parlementaires ont un rôle crucial à jouer. En ce sens, j’ai signé avec des dizaines de parlementaires du monde entier cet appel à l’action !

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Protection des civils contre l’utilisation d’armes explosives en zones peuplées : l’appel à l’action parlementaire !

 

<< Au début du XXe siècle, 15% des victimes des conflits armés étaient des civils. Un demi-siècle plus tard, ce chiffre atteignait 50%. Ces dernières années, ils représentaient près de 90% des victimes lorsque des armes explosives étaient utilisées en zones peuplées.

Les conflits sont de plus en plus complexes et urbanisés. Frappes aériennes, artillerie lourde, lance-roquettes: les bombardements et pilonnages de villes en temps de guerre sont devenus la norme et non plus l’exception. Lorsqu’elles sont utilisées au cœur des villes, les armes explosives blessent, tuent, détruisent infrastructures et vies humaines sans distinction. L’ampleur de ces drames est incommensurable : au-delà des pertes humaines, les destructions engendrent des déplacements massifs et entraînent dommages psychologiques, coupures d’eau et d’électricité, fermetures d’écoles et ruptures d’accès aux soins.

Marioupol en Ukraine, Mossoul en Irak, Alep en Syrie, Sanaa au Yémen, Dessie en Éthiopie… les multiples conflits armés contemporains laissent des quartiers entiers en ruines dans leur sillage. Autour des points d’impact, les populations et les infrastructures ne tiennent pas le choc. La ville a remplacé les champs de batailles ouverts, devenant l’épicentre des guerres, entraînant avec elle des centaines de milliers de victimes civiles. Les effets dominos sont dévastateurs et demeurent encore palpables dans la vie quotidienne de familles des années, parfois des décennies après les frappes.

Face à ces souffrances humaines, résultant parfois de violations du droit international humanitaire, il est impératif d’agir. Nous saluons l’adoption de la nouvelle déclaration politique internationale adoptée lors de la conférence de Dublin le 18 novembre 2022. Nous appelons l’ensemble de nos États à adopter ce texte historique, et à œuvrer sans tarder à son processus d’universalisation et de mise en œuvre effective.

Par leur signature, les États s’engagent à mettre en œuvre des politiques nationales pour limiter et s’abstenir d’utiliser des armes explosives en zones peuplées. Ils reconnaissent la nature colossale des dommages causées par leur usage et les effets dominos sur les infrastructures civiles, et s’engagent, dans le même temps, à partager leurs données sur les conséquences directes et indirectes de ces armes. Les États s’engagent, enfin, à assister les victimes et les communautés, à faciliter l’accès humanitaire et à œuvrer pour le déminage humanitaire des zones touchées.

Tout au long de ce processus, nous, parlementaires de différents pays et de tous horizons, avons un rôle crucial à jouer. En tant que législateurs, notre rôle est central dans la mise en œuvre d’accords internationaux au niveau national. Dans plusieurs de nos pays, un processus parlementaire actif s’est déroulé pendant plusieurs années, avec le concours de la société civile, pour appeler nos gouvernements à se saisir d’urgence de ce sujet essentiel.

La mise en œuvre de ce présent accord doit à présent être aussi rapide, concrète et efficace que possible. Convaincus de la portée historique et universelle de ce texte, nous souhaitons prendre toute notre part dans son suivi. Pour cette raison, nous nous engageons à mettre en place les 9 actions concrètes suivantes :

  1. Signer l’appel parlementaire international du Réseau International sur les Armes Explosives (INEW). Cet appel résume, comme le présent texte, notre engagement sans faille à œuvrer pour une meilleure protection des civils face aux bombardements en zones peuplées.
  2. Encourager le développement de politiques et pratiques nationales en matière de protection des civils et d’utilisation d’armes explosives en zones peuplées. Cela comprend les politiques militaires, ainsi que les politiques d’assistance aux victimes et de soutien aux communautés touchées par le conflit. Cela inclus également la mise en place de mécanismes de collecte et de partage des données sur l’utilisation des armes explosives dans les zones peuplées, ainsi que sur leurs effets directs et indirects.
  3. Créer un « groupe d’amis de la déclaration politique EWIPA » au sein de nos Parlements respectifs. Les groupes d’études et d’amitié doivent être l’un des principaux véhicules permettant le dialogue régulier avec les acteurs diplomatiques et militaires, mais aussi avec les ONG internationales, locales, et tout acteur de la société civile travaillant sur le sujet. Ils sont des plateformes institutionnelles qui devront permettre, au sein de chaque parlement, un travail de fond sur le sujet, un dialogue exigeant et une mobilisation pérenne.
  4. Œuvrer à la collaboration et au dialogue interparlementaire sur le suivi de la déclaration politique. Les instances telles que l’Union Interparlementaire (IPU) ainsi que tout autre espace de concertation et de travail partagé de parlementaires de plusieurs pays, devront être des plateformes permettant une mobilisation conjointe sur ces enjeux. Nous encouragerons tout particulièrement les synergies et l’échange de bonnes pratiques entre parlementaires travaillant sur d’autres enjeux de désarmement et protection des civils.
  5. Initier des auditions publiques dans les commissions des affaires étrangères et de la défense. Ces auditions contribuent à l’indispensable effort de transparence des gouvernements envers leurs parlementaires, qui contrôlent le respect des engagements internationaux des gouvernements, notamment sur les enjeux de défense, de diplomatie, de respect du droit et d’action humanitaire.
  6. Travailler à faire adopter une résolution parlementaire sur EWIPA. La résolution, qui peut prendre la forme d’une motion, n’est pas juridiquement contraignante. Toutefois, sa portée symbolique lui confère un poids politique certain : celui d’un Parlement qui affirme sa volonté commune et transpartisane d’œuvrer au succès d’un tel accord.
  7. Poser des questions, écrites et orales, en séance publique comme en commission, au gouvernement ainsi qu’aux ministres. Cet outil demeure un outil de suivi régulier efficace, qui contribuera à la plus grande transparence de l’action des gouvernements dans leur suivi et mise en œuvre de la déclaration politique.
  8. Jouer le rôle d’ambassadeurs ou de porte-paroles médiatiques et publics, en travaillant avec les journalistes ou en utilisant nos réseaux sociaux pour contribuer à la plus grande visibilité des différentes tragédies humanitaires et à l’impact de la déclaration politique. Cette action peut inclure un travail avec des personnes directement affectées, ou, en coordination avec les acteurs humanitaires, en rencontrant directement des communautés impactées.
  9. Œuvrer dans nos circonscriptions à la sensibilisation du grand public sur ces enjeux. Par des réunions publiques, nous avons un rôle à jouer dans l’effort de pédagogie, au niveau local, pour convaincre de la pertinence et de l’impact de la déclaration politique EWIPA. >>

 

Suspension des financements de l’Aide Publique au Développement de la France en direction du Mali : une fuite en avant irresponsable

Il y a 7 mois, le 16 novembre 2022

Par Pierre Laurent

La suspension des financements de l’aide publique au développement (APD) en direction du Mali, y compris de ceux qui transitent par des organisations humanitaires, est une décision qui scandalise à juste titre le monde associatif en France et au Mali. J’ai relayé leurs inquiétudes auprès de la ministre des affaires étrangères.
Cette décision des autorités françaises est irresponsable. Elle participe à la dégradation de la situation sur place et des relations entre nos deux pays. Elle lie, de fait, les organisations concernées à la politique étrangère de la France, ce qui aura des conséquences préjudiciables pour elles au Mali et ailleurs. L’heure est au contraire à la responsabilité et au dialogue.
C’est pourquoi j’avais en juillet dernier parrainé un colloque de la Coordination des élus français d’origine malienne (CEFOM) et de Cités Unies France qui traitait du développement économique et social, de la paix ainsi que des échanges entre nos deux peuples. J’appelle les autorités de mon pays à emprunter cette démarche de raison plutôt que d’appliquer une politique de coups de menton néfaste pour tous.

GARDONS LE CONTACT

M. Pierre Laurent attire l’attention de Mme la ministre de l’Europe et des affaires étrangères sur la suspension des financements de l’aide publique au développement de la France en direction du Mali, y compris de ceux qui transitent par des organisations humanitaires.

Selon les organisations concernées, cette décision des autorités françaises ne peut qu’avoir des conséquences néfastes en matière d’aide humanitaire. Elle intervient dans un contexte dans lequel 7,5 millions de personnes au Mali ont besoin d’aide humanitaire, soit plus de 35 % de la population malienne, et alors que ce pays est en 184e position sur l’indice de développement humain (IDH).

Les organisations humanitaires concernées estiment qu’en les liant de manière évidente à la politique étrangère de la France, la décision de suspension des financements au Mali comporte notamment des risques réputationnels pour ces organisations au-delà des risques sécuritaires immédiats majeurs, y compris dans d’autres pays de la région. Cette préoccupation des organisations s’étend également à tous les autres contextes où la France finance des opérations humanitaires et de solidarité internationale. Elles ont interpellé le Président de la République française en ce sens.

Il apparaît évident qu’une telle décision des autorités françaises constitue une fuite en avant extrêmement préjudiciable pour les peuples maliens et français. Elle participe à la dégradation de la situation et des relations entre nos deux pays, alors qu’au contraire il faudrait renouer le dialogue respectant la souveraineté de ce peuple et de ce pays. Il lui demande ce qu’elle compte faire en vue de revenir sur cette décision.

 

Question écrite n°03886 : https://senateurscrce.fr/activite-des-senateurs/les-questions-au-gouvernement/les-questions-ecrites/article/une-fuite-en-avant-irresponsable

Tribune internationale de parlementaires : « Nous devons condamner toute menace d’utilisation d’armes nucléaires »

Il y a 7 mois, le 11 novembre 2022

Par Pierre Laurent

Avec 41 parlementaires issus de 13 pays, j’ai signé il y a quelques jours dans le média européen Euractiv une tribune pour dénoncer les menaces, devenues récurrentes ces derniers mois, d’emploi de l’arme nucléaire par la Russie. Engagés dans nos pays respectifs pour faire grandir le débat sur le danger planétaire que représentent ces armes, nous refusons de voir cette folle rhétorique se banaliser. Retrouvez ici la traduction de notre tribune en français !

GARDONS LE CONTACT

<< En tant que parlementaires de 13 pays, nous sommes alarmés et consternés par la récente menace de la Russie d’utiliser des armes nucléaires « en cas de menace contre l’intégrité territoriale de notre pays et pour défendre la Russie et notre peuple ».
Cette menace est plus explicite que les précédentes menaces de la Russie d’utiliser des armes nucléaires contre toute personne intervenant dans le conflit en Ukraine, et est particulièrement inquiétante dans le cadre des plans de la Russie d’annexer illégalement les zones qu’elle contrôle actuellement en Ukraine. Nous condamnons cette menace d’utiliser des armes nucléaires et demandons au gouvernement russe de la retirer immédiatement.
Nous sommes également gravement préoccupés par les réponses d’autres gouvernements qui laissent entendre que des armes nucléaires pourraient être utilisées en guise de représailles, ainsi que par les commentaires et analyses abstraites examinant des scénarios dans lesquels des armes nucléaires pourraient être utilisées dans le conflit ukrainien, et évaluant les implications militaires qui en découlent.
Ces évolutions augmentent fortement les risques d’utilisation d’armes nucléaires. L’idée d’utiliser des armes nucléaires se normalise et le tabou de leur utilisation, vieux de plusieurs décennies, s’effrite. L’escalade des menaces et des spéculations met également en péril le régime mondial de non-prolifération nucléaire en incitant d’autres gouvernements à envisager d’acquérir des armes nucléaires ou de conclure des alliances avec des pays dotés d’armes nucléaires. Tout ceci est extrêmement dangereux et exige une réponse urgente et décisive de la part de la communauté internationale.
Tout d’abord, nous devons rappeler aux gouvernements et aux citoyens ce qui est exactement en jeu : ce que signifierait en réalité toute utilisation d’armes nucléaires, et les conséquences humanitaires étendues et catastrophiques qui en résulteraient, en particulier dans les régions densément peuplées comme l’Europe.
Ces conséquences signifient que les armes nucléaires ne peuvent et ne doivent pas être discutées uniquement en termes de stratégie et de tactique militaires. Même les armes nucléaires dites « tactiques », du type de celles que certains pensent que la Russie pourrait utiliser dans le conflit ukrainien, ont généralement une puissance explosive de l’ordre de 10 à 100 kilotonnes. À titre de comparaison, la bombe atomique qui a détruit Hiroshima en 1945, tuant 140 000 personnes, avait une puissance de seulement 15 kilotonnes.
Une seule détonation nucléaire tuerait probablement des centaines de milliers de civils et en blesserait beaucoup plus ; les retombées radioactives pourraient contaminer de vastes zones dans plusieurs pays. Les études et les analyses menées depuis de nombreuses années par les agences des Nations unies et le Comité international de la Croix-Rouge ont systématiquement montré qu’il ne pourrait y avoir de réponse humanitaire efficace après l’utilisation d’une arme nucléaire.
Les capacités médicales et d’intervention d’urgence seraient immédiatement dépassées, ce qui aggraverait le nombre déjà considérable de victimes. Une panique généralisée entraînerait des déplacements massifs de population et de graves perturbations économiques. Des détonations multiples seraient bien sûr bien pires.
En tant que parlementaires, nous pensons qu’il est crucial que les personnes que nous représentons soient pleinement conscientes des risques catastrophiques inhérents aux armes nucléaires, et disposent des informations et des données factuelles nécessaires pour demander des comptes aux gouvernements et les pousser à agir.
Deuxièmement, nous devons condamner de manière cohérente et catégorique toute menace d’utilisation d’armes nucléaires.
Compte tenu de la portée considérable de toute utilisation d’armes nucléaires, une menace nucléaire contre un pays est une menace contre tous les pays. Il ne s’agit pas seulement de la Russie et de l’Ukraine. À l’instar du changement climatique et des pandémies, les risques terribles posés par les armes nucléaires constituent un problème mondial et exigent une réponse mondiale concertée.
Une condamnation cohérente et sans équivoque de la part de la communauté internationale peut stigmatiser et délégitimer les menaces nucléaires, contribuer à rétablir et à renforcer la norme contre l’utilisation des armes nucléaires, et renforcer les efforts de non-prolifération.
En juin, les parties au Traité sur l’interdiction des armes nucléaires ont adopté une déclaration condamnant sans équivoque « toute menace nucléaire, qu’elle soit explicite ou implicite et quelles que soient les circonstances ».
Nous appelons tous les gouvernements à publier immédiatement des condamnations catégoriques similaires et à répondre rapidement et fermement à toute menace future d’utilisation d’armes nucléaires. >>
Signataires (par ordre alphabétique) :
Clare Adamson, MSP (UK/Écosse)
Barry Andrews, MEP (Irlande)
Nicole Audrey, MSP (UK/Écosse)
Laura Boldrini, MP (Italie)
Alexis Brunelle-Duceppe, MP (Canada)
Ariane Burgess, MSP (UK/Écosse)
Maggie Chapman, MSP (UK/Écosse)
Guillaume Defossé, MP (Belgique)
Nathaniel Erskine-Smith, MP (Canada)
Annabelle Ewing, MSP (UK/Écosse)
Jim Fairlie, MSP (UK/Écosse)
Ingrid Fiskaa, MP (Norvège)
Kenneth Gibson, MSP (UK/Écosse)
Gabriela Heinrich, MP (Allemagne)
Fiona Hyslop, MSP b(UK/Écosse)
Andres Ingi Jonsson, MP (Islande)
Lotta Johnsson Fornarve, MP (Suède)
Kentaro Gemma, MP (Japon)
Akira Kasai, MP (Japon)
Bill Kidd, MSP (UK/Écosse)
Mari Kushibuchi,MP (Japon)
Pierre Laurent, Sénateur (France)
Max Lucks, MP (Allemagne)
Paul McLennan, MSP (UK/Écosse)
Senator Marilou McPhedran (Canada)
Heather McPherson, MP (Canada)
Silvia Modig, MEP (Finlande)
Rolf Mützenich, MP (Allemagne)
Bell Ribeiro-Addy, MP (UK)
Mark Ruskell, MSP (UK/Écosse)
Mounir Satouri, MEP (France)
Merle Spellerberg, MP (Allemagne)
Ralf Stegner, MP (Allemagne)
Kaukab Stewart, MSP (UK/Écosse)
Kevin Stewart, MSP (UK/Écosse)
Collette Stevenson, MSP (UK/Écosse)
Hakan Svenneling, MP (Suède)
Masaaki Taniai, MP (Japon)
Steven de Vuyst, MP (Belgique)
Thomas Waitz, MEP (Autriche)
Elena Whitham, MSP (UK/Écosse)
Janine Wissler, MP (Allemagne)

Guerre en Ukraine – l’intervention de Pierre Laurent au Sénat

Il y a 7 mois, le 27 octobre 2022

Par Pierre Laurent

Monsieur le Président, Madame la Première Ministre, Mesdames et Messieurs les Ministres, Mes chers collègues,   Le 24 février Vladimir Poutine ordonnait l’invasion illégale de l’Ukraine par l’armée russe, violant le droit international et l’intégrité d’un État souverain. Il déclenchait un conflit d’une ampleur inédite depuis 1945, qui appelle notre solidarité auprès du peuple ukrainien. […]

GARDONS LE CONTACT

Monsieur le Président,

Madame la Première Ministre,

Mesdames et Messieurs les Ministres,

Mes chers collègues,

 

Le 24 février Vladimir Poutine ordonnait l’invasion illégale de l’Ukraine par l’armée russe, violant le droit international et l’intégrité d’un État souverain. Il déclenchait un conflit d’une ampleur inédite depuis 1945, qui appelle notre solidarité auprès du peuple ukrainien.

Illégale, et terriblement meurtrière, cette guerre ne connaît depuis février que l’escalade. Elle menace aujourd’hui la sécurité internationale.

Cette guerre c’est à ce jour selon le HCR, 8 millions d’Ukrainiens réfugiés à l’extérieur de l’Ukraine, des millions de déplacés intérieurs, plus de 15 000 victimes civiles, tuées ou blessées, ce sont des dizaines de milliers de morts au combat, ukrainiens et russes, ce sont des crimes de guerre. Et c’est la répression des dissidents et des conscrits en fuite. La jeunesse des deux pays est chaque jour fauchée dans les combats.

La guerre, c’est l’effondrement de moitié du PIB ukrainien, la destruction du tiers des infrastructures énergétiques. Le Premier ministre ukrainien annonce déjà qu’en l’état le coût de la reconstruction se chiffrera en centaines de milliards de dollars.

La guerre, c’est l’aggravation de la crise économique et énergétique partout sur la planète, frappant d’abord les plus faibles. C’est le spectre de la famine, comme en Somalie où le manque de nourriture tuera aussi sûrement et même plus que les bombes.

Cette guerre, c’est l’engloutissement quotidien de ressources considérables qui manquent tant aujourd’hui pour répondre aux défis du développement humain et du changement climatique. C’est l’aggravation catastrophique des émissions de gaz à effet de serre, qui bat en brèche tous les objectifs climatiques. La nouvelle dépendance de l’Europe au GNL américain, 2,5 fois plus émetteur de CO2 que le gaz naturel, en est un exemple frappant.

La guerre, c’est l’embrasement possible à tout instant en Moldavie, en Géorgie, et déjà à l’œuvre en Arménie avec l’attaque azérie. Ce sont tous les points de tension du globe ravivés, le spectre d’un nouveau conflit mondial, le retour de la menace de l’annihilation nucléaire.

Moscou réinterprète dangereusement la grammaire de sa dissuasion. Et la surenchère peut mener, de manière irresponsable, à l’éventualité d’un conflit nucléaire. Ces faits alarmants devraient d’ailleurs inviter à relancer, de la manière la plus vigoureuse qui soit, les discussions sur le désarmement multilatéral et un régime mondial d’interdiction des armes nucléaires.

La guerre entre la Russie et l’Ukraine, et derrière elle les forces de l’OTAN, est un terrible engrenage dont nous aurons, nous le savons, beaucoup de mal à sortir.

Faut-il dès lors se résigner à l’escalade ? Sauf à accepter de voir s’amplifier la catastrophe en cours pour des semaines, des mois, et peut-être des années encore, nous pensons, Madame la Première Ministre, qu’il faut avoir le courage de ne pas abandonner l’exigence d’un cessez-le-feu le plus rapide possible sur le front.

Dire cela est-ce céder aux Russes, comme on l’entend dire, comme s’il s’agissait d’accepter de geler la situation sur la ligne de front actuelle ? Bien sûr que non ! Dire cela, c’est demander que dans la guerre, la voie de la paix et de la diplomatie ne s’éteigne pas, et qu’elle reprenne la main au plus vite, sans accepter le terrible prix humain d’une amplification de cette guerre ; une guerre à l’heure qui l’est sans perspective de fin, et probablement sans vainqueur parmi les peuples.

Nous voulons le retour de la diplomatie pour tracer le chemin d’une négociation globale récusant le changement de frontières et l’acquisition des territoires par la force, demandant le retrait des troupes russes, rouvrant le dialogue sur l’autodétermination, la garantie de souveraineté et de sécurité pour tous les  peuples.

A ceux qui préconisent la guerre, et donc aujourd’hui forcément son escalade, avec toutes ses conséquences imprévisibles, en faisant miroiter sa fin prochaine, je demande de me dire dans quel pays la guerre a ces trente dernières années apporté la solution et la paix promise : en Afghanistan ? En Irak ? En Syrie ? En Libye ? Au Yémen ? Au Sahel ? Tous ces pays sont en ruines et en proie aux violences. Et pourtant les ennemis étaient tout aussi condamnables. Non la voie de la diplomatie pour la paix n’est pas celle de la reddition. Elle peut être celle de l’espoir, celle qui épargne aux peuples la misère, la destruction et la barbarie.

Nous livrons des armes à l’Ukraine, et malgré nos demandes répétées le Parlement ne dispose pas à ce jour de toutes les informations, ni sur ce que nous livrons, ni sur les incidences de ces livraisons sur nos propres capacités de défense. Qui peut dénier, tant que la guerre dure, à un Etat agressé comme l’Ukraine le droit de se défendre et de faire appel pour cela à ses alliés ? Personne. Mais qui peut assurer que ces livraisons, même massives, ouvriront la voie à la solution militaire du conflit en cours ? Alors quelles que soient les décisions prises à ce propos, rien ne doit nous détourner d’un effort immédiat pour retrouver la voie de la paix par la négociation internationale et entre les deux parties du conflit.

Le président de la République a eu raison, le 12 octobre sur France 2 puis ce dimanche en Italie, de remettre dans le débat cette perspective de la paix et du retour à la table des négociations, mais il semble dans le même mouvement en repousser toujours l’échéance.

Nous pensons que la France, avec d’autres,  doit y travailler sans tarder. Que pensez-vous madame la Première Ministre de la proposition d’un ancien ambassadeur de France hier dans un grand journal du soir, d’engager sans tarder entre Ukrainiens et alliés une discussion sur ce que devrait être un calendrier et une position de négociation ?

Que pensez-vous des voix qui s’élèvent, dans une tribune d’anciens diplomates italiens, s’exprimant sur les bases possibles d’un règlement négocié, ou dans la lettre adressée par 35 démocrates de la Chambre des Représentants à Joe Biden pour l’enjoindre de « déployer de vigoureux efforts diplomatiques en soutien à un règlement négocié » ? Que pensez-vous des déclarations du pape François, que le président de la République vient de rencontrer, et qui n’a cessé d’appeler à ce que les armes se taisent depuis le début du conflit ?

Pour avancer dans ce sens, parce que nous savons que le chemin est rempli d’obstacles, nous pouvons travailler à conforter tous les accords partiels déjà négociés pour élargir les brèches.

Je pense à l’accord sur les exportations de céréales, qui arrive à échéance le 22 novembre : travaillons-nous à sa reconduction ?

Est-il également possible d’agir pour conforter l’accord sur la sécurisation des centrales nucléaires en lien avec l’ONU et l’AIEA ?

Comment agir encore pour permettre l’action des organisations humanitaires, alors que le droit international humanitaire est aujourd’hui partout bafoué. Comment assurer la protection des installations civiles indispensables aux populations ?

La priorité est également de prévenir l’extension du conflit aux pays frontaliers. Un engagement réciproque des parties prenantes, doublé d’un engagement multilatéral à ne pas impliquer de nouveaux pays frontaliers dans la guerre pourrait être un objectif.

Au-delà, l’objectif doit bien être celui de rouvrir une négociation globale de sécurité,  sous l’égide de l’OSCE.

Madame la Première Ministre, pour toutes ces raisons nous pensons que la France devrait entamer la construction d’une grande coalition mondiale pour la paix, qui ne peut être enfermée dans le seul bloc de l’OTAN ! La logique des blocs, d’ailleurs, fait partie du problème, qui nous voit sans barguigner classer la Turquie, l’Arabie Saoudite et des gouvernements d’extrême-droite européens dans le camp de la démocratie.

De nombreux pays, qui refusent l’alignement derrière la Russie, mais aussi derrière l’OTAN, souhaitent une telle coalition de la paix, qui se donne pour but la construction commune de la paix, par la construction de sécurités collectives et de sécurité humaine, alimentaire, sanitaire, énergétique, climatique… partagées.

La France devrait en prendre l’initiative. Nous devons pour cela parler à des grands pays comme l’Inde ou comme la Chine, sans les jeter dans les bras des Russes comme certains le font, à des pays plus modestes comme en Asie centrale, comme le Kirghizstan, le Kazakhstan, l’Ouzbékistan, qui sont intervenus à plusieurs reprises pour critiquer la guerre. Nous devons parler à des pays africains, menacés par les conséquences de la guerre, et qui veulent un ordre mondial plus juste et plus solidaire, sans avoir à choisir entre deux systèmes de domination.

Pour constituer cette grande coalition, la France doit reprendre sa liberté d’initiative pour assumer pleinement, en Europe et dans le monde, son rôle au service de la paix.

Je vous remercie.

Forum Européen 2022 à Athènes – Ouverture de la conférence politique

Il y a 8 mois, le 21 octobre 2022

Par Pierre Laurent

Réuni du 21 au 23 octobre 2022 à Athènes, le Forum Européen des forces de Gauche, Vertes et Progressistes est plus que jamais un temps fort pour toutes les forces engagées en faveur du changement sur notre continent. Il y a quelques minutes j’ai eu le plaisir d’introduire la conférence politique de cette 6ème édition, en rappelant les enjeux brûlants auxquels nous sommes confrontés, du climat à la justice sociale, en passant évidemment par la paix !

GARDONS LE CONTACT

Chers camarades, chers amis,

La conférence politique qui nous réunit maintenant, après les premières séances de travail du Forum, est un moment très important. Dans quelques instants, je céderai la parole, pour accueillir cette conférence à notre camarade Alexis Tsipras. Je veux le remercier de sa présence, qui nous honore. Comme coordinateur de ce Forum, je suis très heureux qu’il se tienne cette année à Athènes.

Je n’oublie rien de ce qui a commencé ici, il y a dix ans, pour ouvrir la voie à tous nos combats contre les politiques d’austérité qui déferlaient alors sur les peuples européens pour leur faire payer le krach financier des marchés capitalistes de 2008.  Syriza et Alexis à sa tête, avec le soutien de la Gauche européenne, vous avez ouvert la voie. Elle ne fut pas sans difficultés. Nous avons éprouvé tous ensemble l’espoir, les points marqués et les revers,  la férocité de nos adversaires, qui ont voulu faire payer cher au peuple grec son audace d’alors. Nous avons appris combien nos combats pour changer l’Europe s’inscriraient dans la durée et combien les victoires futures ne pourraient s’écrire que dans la solidarité la plus large. Et je suis sûr que vous êtes en train de construire vos prochaines victoires.

Aujourd’hui, les urgences sont décuplées. En ce moment même, le  Conseil européen accueille à sa table une première ministre italienne d’extrême-droite, et le peuple britannique subit un nouvel épisode du  chaos politique du Brexit, avec la démission de Lizz Truss. En Ukraine, la guerre tue et menace la sécurité de tous en Europe. Oui, ce Forum européen, créé il y a  six ans maintenant à Marseille, pour défricher les voies de combats communs entre forces de gauche ,vertes, socialistes, progressistes, forces sociales et syndicales, est plus que jamais nécessaire.

Les peuples européens  sont face à des défis historiques, et même existentiels avec les menaces qui pèsent sur l’avenir même de l’Humanité que sont les déréglements climatiques et la guerre.

Tous les domaines de la vie humaine sont impactés. Inventer un autre mode de développement pour une égalité durable, une autre manière de faire l’Europe, un nouvel ordre mondial plus juste et plus sûr, ne sont pas des utopies mais des urgences concrètes. Ici, nous cherchons des solutions concrètes à ces urgences, des voies concrètes de changement.

Nous sommes divers, notre Forum est pluraliste, et nous en sommes fiers. Mais beaucoup nous rassemble. Partout où nous vivons , nous pouvons agir ensemble, dans les mêmes directions. Permettez moi d’ en souligner quelques unes.

 

  1. La transition vers une économie décarbonée, protégeant l’humain et tout le vivant, la grande transformation vers une nouvelle civilisation durable ne peuvent plus attendre. Nous voulons pour cela des trajectoires et des conceptions nouvelles en Europe, avec des plans d’investissements massifs dans toute l’Europe, avec de grands services publics pour promouvoir la logique des biens communs. La déréglementation, la mise en concurrence systématique sont devenues, pas seulement un mal social, mais  des dangers mortifères pour nos sociétés. On l’ a vu pendant la pandémie. L’anticipation, la planification, la coopération redeviennent des exigences modernes. L’Europe doit changer d’échelle, de trajectoire, de stratégie économique.

 

  1. Pour être réussie, cette grande transformation sera juste socialement ou ne sera pas. La sécurité humaine, et non celle des profits, doit devenir la priorité, sécurité sociale, sanitaire, alimentaire, sécurité de tous les droits humains. Réussir la transition, c’est faire de la sécurité humaine l’objectif, et non la compensation de dérèglements qui se généraliseraient sans et contre ceux qui produisent et travaillent pour la société. Repenser la finalité du travail est nécessairement au cœur de la refondation productive nécessaire. Les indicateurs de la richesse doivent changer, et la mise en partage devenir la règle des sociétés qui veulent penser l’avenir.

 

  1. Les changements concernent l’humanité toute entière. Les Européens sont interdépendants et l’Europe est interdépendante avec le reste du monde. Nous voulons une Europe ouverte et solidaire parce que c’est la condition d’une sécurité humaine globale.

 

Le combat féministe est pour cela central. Pas d’humanité durable, sans égalité durable, sans extinction du patriarcat et de toutes les violences.

C’est la même chose pour l’accueil digne des migrants. Un combat qui doit être mené en changeant les relations de l’Europe au monde, pour appuyer le développement libre de leurs pays d’origine, contre toutes les guerres, les prédations, les dominations dont les grandes puissances occidentales européennes ont été et restent les grands organisateurs aux côtés des grandes firmes multinationales.

Jamais, pour toutes ces raisons fondamentales, les extrêmes droites ne peuvent être une alternative pour les peuples. C’est le contraire. C’est un grand combat car la perte de confiance politique des peuples nourrit les extrêmes-droites . Elles ne sont pas le remède, mais le mal aggravé, un danger pour nos sociétés. Elles sont autoritaires, liberticides et ultralibérales, machistes, racistes, hostiles aux principes fondamentaux de la solidarité humaine. Elles portent en elles le poison nationaliste qui conduit tôt ou tard à la guerre.

Pour gagner la course de vitesse engagée, il ne suffira pas de faire barrage, notre travail unitaire doit construire les nouvelles réponses de la gauche, en phase avec les enjeux de ce monde en pleine mutation. Pour cela, il y a deux impératifs :

– le premier est de renverser, bataille après bataille, la logique des politiques économiques et financières de l’Union européenne. Toutes les urgences du quotidien, de l’énergie à la santé, appellent aujourd’hui des réponses d’urgence, mais surtout des changements structurels, et des financements massifs. Le Pacte budgétaire, suspendu pendant la pandémie, doit être définitivement abandonné, au profit d’un nouveau modèle de financement des investissements sociaux et durables indispensables.

– Le second impératif est d’enrayer la logique de guerre qui s’installe car si l’escalade guerrière l’emporte, elle balaiera avec elle tous les espoirs d’améliorer la vie humaine. Elle répandra la peur et la terreur, comme elle le fait aujourd’hui en Ukraine et parmi le peuple russe.

La décision inacceptable de Vladimir Poutine d’attaquer l’Ukraine place l’Europe et le monde au bord du précipice. L ‘escalade guerrière ne fera pas de vainqueur parmi les peuples.

Nous devons remettre au plus vite dans le paysage la nécessité absolue de stopper la guerre et de retourner à la négociation d’une solution conforme au respect du droit international et à l’intégrité de l’Ukraine. Cela devrait aller de pair avec  une nouvelle conférence paneuropéenne  sur les principes de sécurité collective en Europe .

Nous devons résister à l’emballement actuel du surarmement et de la militarisation des relations internationales. C’est une folie. La logique des blocs militaires est une hérésie dans un monde qui appelle à la mise en commun des connaissances, des technologies, des intelligences.

Nous devons relancer les mobilisations sur le désarmement. La signature du traité pour l’interdiction des armes nucléaires est une bataille d’avenir. La 1ère convention annuelle de l’ONU sur ce traité a eu lieu à Vienne en Autriche. L’Irlande accueillera  le 17 juin à Dublin la cérémonie de signature d’une nouvelle déclaration internationale arrachée de haute lutte pour limiter l’usage des armes explosives en zones peuplées. L’Europe peut être une terre de paix et de désarmement, à nous d’en lever le drapeau.

Enfin l’Europe doit garantir la paix dans les Balkans, agir pour mettre fin à l’occupation turque à Chypre, faire respecter les accord de paix en Irlande du Nord et ouvrir la voie à la réunification de l’Irlande. Aucune bombe à retardement ne doit demeurer enfouie sous la braise  en Europe. On sait aujourd’hui le prix payé de la non application des accords de Minsk.

Voilà, chers camarades, bien des sujets de travail entre nous.

Je passe maintenant la parole à Alexis, en lui redisant le plaisir que nous avons à tenir ce Forum, ici, à Athènes.

 

 

Seul le prononcé fait foi