Situation en République démocratique du Congo – Prévenir une nouvelle crise majeure et déstabilisatrice

Il y a 1 an, le 19 novembre 2021

Par Pierre Laurent

J’ai attiré l’attention de M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères sur la situation en République démocratique du Congo (RDC). Ce pays est l’un des plus pauvres du monde alors qu’il regorge de richesses de toutes sortes. Par ailleurs, depuis vingt-cinq ans, des atrocités se déroulent notamment à l’est de ce pays dans […]

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J’ai attiré l’attention de M. le ministre de l’Europe et des affaires étrangères sur la situation en République démocratique du Congo (RDC).

Ce pays est l’un des plus pauvres du monde alors qu’il regorge de richesses de toutes sortes. Par ailleurs, depuis vingt-cinq ans, des atrocités se déroulent notamment à l’est de ce pays dans ce qu’il est convenu d’appeler les deux guerres du Congo, qui sont en fait des guerres de pillage au bénéfice, en dernier ressort, de multinationales qui passent notamment par des pays voisins. Les conséquences de ces guerres ont fait des millions de victimes faisant de ce conflit au Congo sans doute le plus meurtrier depuis la Seconde Guerre mondiale.

Ces atrocités sont documentées chaque année depuis 2003 par un groupe d’experts de l’organisation des Nations unies (ONU), qui fait également état des multinationales qui y sont impliquées, ainsi que dans le rapport Mapping publié en octobre 2010. Le rapport Mapping, commandé par le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme, recensait de nombreux crimes de guerre, crimes contre l’humanité et de possibles génocides commis entre 1993 et 2003 en RDC et recommande des poursuites à ce sujet.

En cohérence avec cet objectif, le titulaire du prix Nobel de la paix 2018, de nationalité congolaise, revendique depuis trois ans la création d’un tribunal pénal international et la création de chambres mixtes avec des magistrats congolais et internationaux au sein de juridictions congolaises pour poursuivre les auteurs de violations des droits de l’homme.

Je lui a demandé ce que la France compte faire en vue d’appuyer cette démarche.

Par ailleurs, il est à noter que dans la suite des dernières élections nationales en 2018, dont les résultats ont été très contestés – y compris, dans un premier temps, par la France – l’opposition ainsi qu’un bon nombre d’acteurs de la société congolaise, et parmi eux les églises, mettent en cause l’organisation de la commission électorale initiée par le pouvoir en place qui se ferait, selon eux, en complicité avec des chancelleries étrangères dont celle des États-Unis et de l’Union européenne. Ils craignent que si les leçons de 2018 ne sont pas tirées et que des mesures ne sont pas rapidement prises pour apaiser les tensions et renforcer la confiance de la population, le pays se dirige vers une nouvelle crise majeure et déstabilisatrice. Ils dénoncent également la répression dont ils font l’objet à l’occasion de manifestations pour exiger la réforme consensuelle de l’administration électorale, dénoncer la dégradation des conditions de vie, la corruption et des massacres dans la partie Est du Congo.

Je souhaite donc savoir quels actes la diplomatie française compte poser par rapport à l’ensemble de ces sujets.

Liberté d’expression en Côte d’Ivoire : des dérives inquiétantes

Il y a 1 semaine, le 15 mars 2023

Par Pierre Laurent

Que ce soit la tentative de bâillonner Pulchérie Gbalet, présidente de l’ONG Alternative Citoyenne Ivoirienne (ACI), ou les récentes peines de prison prononcées à l’encontre de docteurs non intégrés et de militants du PPA-CI, les autorités ivoiriennes font à nouveau feu de tout bois pour s’en prendre aux libertés de ses citoyens. J’ai attiré l’attention de la Ministre des Affaires Étrangères à ce sujet.

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M. Pierre Laurent attire l’attention de Mme la Ministre de l’Europe et des Affaires étrangères sur les dernières évolutions de la situation concernant la liberté d’expression en Côte d’Ivoire.

En réponse à sa question écrite n° 01673 du 21/07/2022 sur les prisonniers d’opinion en Côte d’Ivoire, le Ministère a affirmé que la France entretient « un dialogue étroit avec les autorités ivoiriennes sur les questions relatives aux droits de l’Homme et à l’État de droit y compris la justice et les libertés publiques. » Or, malgré ce dialogue étroit que les autorités françaises mentionnent, la situation se dégrade.

Ainsi, par exemple, lors d’une manifestation pacifique du collectif des docteurs non-recrutés le 21 décembre 2022, 45 des manifestants docteurs ont été arrêtés, incarcérés et condamnés le 28 décembre à six mois de prison avec sursis. En outre, le 24 février 2023, environ trente militants et dirigeants du Parti des peuples africains-Côte d’Ivoire (PPA-CI) qui accompagnaient pacifiquement le secrétaire général de leur parti devant les locaux du palais de justice en signe de soutien et solidarité ont été gazés, interpellés, et 27 d’entre eux placés en garde à vue. Sur les 27 manifestants arrêtés, 26 furent condamnés le 9 mars à deux ans de prison pour flagrant délit « de troubles à l’ordre public » par l’intermédiaire d’un attroupement sans aucune violence. Le 27e acquitté et libéré était le seul à ne pas être membre du PPA-CI.

Toutes ces dérives inquiètent fortement les militants politiques et les défenseurs des libertés. Outre les points évoqués dans la question n° 01673, il lui demande ce qu’elle compte faire dans l’immédiat en vue de se saisir des évènements précités pour faire part aux autorités ivoiriennes de ses préoccupations en la matière.

 

Rendre accessibles financièrement les jeux Olympiques pour les habitants des quartiers populaires

Il y a 2 semaines, le 14 mars 2023

Par Pierre Laurent

M. Pierre Laurent attire l’attention de Mme la Ministre des Sports et des Jeux Olympiques et Paralympiques sur la vente des billets pour les Jeux Olympiques de Paris 2024. Alors que le comité d’organisation des jeux Olympiques (COJO) s’était engagé à rendre accessible financièrement cet événement, cet objectif est loin d’être atteint et ce pour […]

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M. Pierre Laurent attire l’attention de Mme la Ministre des Sports et des Jeux Olympiques et Paralympiques sur la vente des billets pour les Jeux Olympiques de Paris 2024.

Alors que le comité d’organisation des jeux Olympiques (COJO) s’était engagé à rendre accessible financièrement cet événement, cet objectif est loin d’être atteint et ce pour plusieurs raisons :

– la jauge d’achat fixée à 30 billets par personne a conduit à un achat massif par des particuliers pouvant donner lieu à de la revente et de la spéculation ;

– la totalité des billets d’un montant inférieur ou égal à 50 euros ont été achetés la première semaine du tirage ;

– les billets pour plus de 15 disciplines sportives ont été épuisés en moins d’une semaine ;

– les billets restants oscillent entre 65 et 250 euros en moyenne ;

– le système de pack, qui oblige à acheter au moins trois billets, rend impossible l’accès à cet événement pour les classes populaires.

Cet état de fait empêche une grande partie de la jeunesse issue des quartiers populaires, y compris de la capitale, d’accéder aux Jeux Olympiques. Pour toutes ces raisons, il lui demande ce qu’elle compte faire pour qu’en concertation avec tous les acteurs concernés, dont la Ville de Paris et le département de Seine-Saint-Denis, des billets à titre gratuit bénéficient aux habitants des quartiers populaires, aux associations partenaires et également aux fédérations et clubs sportifs.

Il lui demande également ce qu’elle compte faire pour que le COJO revoie le dispositif actuel, afin que le prochain tirage au sort en mai 2023 se passe dans les meilleures conditions possibles.

 

Hommage à Martine Durlach

Il y a 2 semaines, le 9 mars 2023

Par Pierre Laurent

Ce 9 mars avec de nombreux élus et citoyens de Paris, avec la famille et les proches de Martine Durlach, nous avons eu l’honneur d’assister à l’inauguration de la place qui désormais portera son nom, dans le 19ème arrondissement de Paris. À cette occasion, j’ai pu prononcer ce discours pour rappeler qui était Martine et quels étaient ses engagements pour Paris et les Parisiens.

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Madame la Maire de Paris, chère Anne Hidalgo,

Monsieur le Maire du 19ème arrondissement, cher François Dagnaud,

Mesdames et Messieurs les Maires-adjoints de la ville,

Cher Bertrand Delanoë,

Chers Jean-François et Gabriel,

 

C’est avec beaucoup d’émotion et une grande fierté que je prends la parole pour honorer la mémoire de Martine Durlach, au nom de la direction nationale du Parti communiste français et des communistes parisiens. Je salue d’ailleurs la présence d’Adrien Tiberti, secrétaire de notre fédération. Fierté de participer avec vous toutes et tous, à inscrire son nom sur cette place, au cœur d’un quartier populaire qu’elle aimait, et qui m’est particulièrement cher.

Permettez-moi pour commencer une petite remarque personnelle. J’ai foulé cette place depuis toujours. Mes parents habitaient au bout de la rue Fessart, tout près des Buttes-Chaumont. J’allais à l’école rue de Palestine, à la maternelle et juste derrière, ma grand-mère habitait rue Olivier-Métra, en face. J’ai donc toujours traversé cette place. J’habite à deux pas d’ici, je continue de le faire tous les jours. Et savoir que cette place, qui m’est si familière va désormais s’appeler Martine Durlach, me remplit de joie.

C’est une juste reconnaissance pour cette femme remarquable, cette militante et cette élue toute sa vie au premier rang des combats progressistes, féministes, démocratiques et sociaux. Je remercie la Mairie de Paris d’avoir très vite, après la disparition de Martine, accepté le principe de cette inscription sur cette place. Et je remercie Jean-François et Gabriel de m’avoir demandé d’y prendre la parole aujourd’hui.

Nous attendions avec impatience cette inauguration. Elle a été un peu reportée, par le Covid ; comme, si je puis dire, un clin d’œil à la maladie d’une manière générale, avec laquelle et contre laquelle Martine a vécu toute sa vie. Mais finalement, le hasard faisant parfois bien les choses, c’est un beau pied-de-nez que d’inaugurer cette place au lendemain de deux énormes mobilisations populaires qui ressemblent tant à ce qui faisait les engagements de Martine.

En ce moment, le pays tout entier dit non à la réforme des retraites, pour que personne ne se voit privé de deux belles années de retraite. Martine n’a pas pu connaître la retraite. Mais elle a connu dans sa chair la valeur du temps, du temps qui manque pour profiter de la vie. Du temps libre, du temps de l’émancipation, elle qui savait si bien transformer tous les temps de la vie militante en moments de joie, de convivialité, de culture, d’humour, de chansons et d’amour.

Et puis nous sommes également au lendemain du 8 mars, en ces temps où le mouvement féministe a pris un nouvel essor, une nouvelle jeunesse. Et tout cela aurait vraiment rempli de bonheur Martine, elle qui n’a jamais désespéré d’un monde meilleur et qui a toujours cultivé sa confiance dans les capacités populaires à ouvrir la voie à une société de justice et d’égalité.

Je vis, comme vous le savez en ce moment, un peu enfermé dans un hémicycle, où je passe quelques jours et quelques nuits – et ce n’est pas fini – pour combattre des ministres et une droite sénatoriale qui, enfermés dans leurs dogmes réactionnaires contre l’immense majorité de notre peuple, tentent de faire reculer nos droits sociaux. Alors, cette inauguration, c’est pour moi en quelque sorte, une petite bouffée d’oxygène. Une bouffée d’oxygène qui nous permet en quelque sorte de respirer l’air de la vraie vie, ce qui manque tant dans l’hémicycle. Celle des souffrances et des espoirs des classes populaires. Et en le faisant, en pensant à Martine et à tous ses combats.

Martine a adhéré au Parti communiste français en 1970, avec cette génération qui, dans la foulée de mai-juin 68, allait faire du Parti communiste une force motrice et majeure des combats unitaires qui conduirait à nouveau la gauche au pouvoir. Une génération communiste qui a su aussi ouvrir la voie à de nouvelles conceptions communistes, plaçant la démocratie au cœur de tout notre projet. Dégageant notre projet de conceptions dépassées, faisant entrer de plain pied le communisme dans le XXIᵉ siècle.

Entrée au comité central en 1987, devenue secrétaire de la Fédération de Paris en 1995 et le restera jusqu’en 2001, succédant dans cette fonction à Henri Malberg, qui a lui aussi une place pas très loin d’ici. Membre du bureau national de notre parti pendant de nombreuses années, elle a joué un rôle essentiel pour ancrer la réflexion et l’action communiste dans les nouveaux enjeux contemporains, et sa mémoire nous est pour cela aussi tellement utile aujourd’hui.

Jeune membre du comité fédéral parisien quand elle en était la première secrétaire, je reste marqué par sa précision, sa créativité, son intelligence des situations politiques, son humanité, sa passion pour le rassemblement, des communistes d’abord, mais des forces progressistes et populaires partout à Paris et dans le pays. Et bien sûr, marqué par sa légendaire bonne humeur, avec laquelle elle conduisait tout son travail politique.

Martine a été une actrice majeure de la reconquête par la gauche parisienne. Après avoir dirigé la section du Parti communiste du quatrième arrondissement, elle est venue habiter dans le 19ᵉ avec Jean-François en 1980. C’est là qu’elle est devenue conseillère d’arrondissement en 1989, conseillère de Paris en 1995. Elle joua alors un rôle de premier plan pour la construction de la bataille unitaire de la gauche pour reconquérir Paris en 2001, avec Bertrand Delanoë.

Dans le 19ᵉ, elle a fait ses armes aux côtés de Paul Laurent, permettez-moi de l’évoquer. Et elle en a pris la relève quand il est décédé, trop tôt, en 1990. Je peux témoigner de la confiance que Paul avait en Martine. Il savait qu’elle serait une grande dirigeant communiste, et il ne s’était pas trompé. Il en était d’autant plus heureux qu’il partageait avec Martine un sens de l’humour aiguisé, et cette devise « qu’un communiste triste, est un bien triste communiste ». Nous savions tous que Martine a lutté toute sa vie contre la maladie génétique qui la rongeait. Mais jamais cela n’entamait sa joie de vivre, c’était même son antidote. Et nous étions tellement reconnaissants de nous faire partager ses éclats de rire permanents.

Martine a consacré sa vie d’élue parisienne à en faire une ville pour tous. Elle a mis autant d’énergie à faire revenir le cinéma au 19ᵉ puisque quand elle est arrivée dans le 19ᵉ, elle a constaté qu’il n’y avait plus un seul cinéma dans cet arrondissement. Tous les cinémas avaient fermé les uns après les autres. Elle a pris la tête d’une bataille mémorable pour le retour du cinéma dans Paris, qui a débouché sur la création des MK2 quai de Seine, et quai de Loire, qui est aujourd’hui un des plus grands lieux du cinéma à Paris.

Mais elle mettait autant d’énergie à faire revenir le cinéma et la culture qu’à se consacrer à la politique de la ville dans les quartiers populaires. D’abord comme maire adjoint à la politique de la ville aux côtés de Bertrand Delanoë de 2001 à 2008, et ensuite à la tête de la mission sur les jeunes filles dans les quartiers populaires que lui avait confié Bertrand Delanoë quand elle a quitté, trop affaiblie, ses mandats. Ce rapport est d’ailleurs d’une incroyable actualité, en ces temps de revendications sociales et féministes. Jean-François nous rappelait hier dans son rapport, par exemple, la recommandation d’une campagne de vaccination des jeunes filles des quartiers populaires contre le papillomavirus. On voit qu’il y a des gens qui découvrent aujourd’hui l’utilité de cette campagne, Martine la recommandait il y a des années déjà.

Je pourrais évidemment parler encore très longtemps de Martine. Au moment de terminer ce propos, je ne peux m’empêcher que trotte dans ma tête la voix de Martine qui aimait tant chanter. Je voudrais dire, pour finir, aux habitant·es du 19e arrondissement, qu’ils ont beaucoup de chance et peuvent être très fiers de cette place Martine-Durlach.

Je vous remercie.

 

 

Seul le prononcé fait foi

Non à l’augmentation des péages d’autoroute !

Il y a 1 mois, le 13 février 2023

Par Pierre Laurent

Ce week-end encore, la France du travail toute entière s’est mobilisée pour défendre le droit à une retraite digne pour toutes et tous. Jeudi prochain, la mobilisation s’annonce de nouveau monstre. Dans la réforme que le Gouvernement persiste à vouloir imposer contre le pays en obligeant à travailler jusqu’à 64 ans minimum, les gros actionnaires […]

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Ce week-end encore, la France du travail toute entière s’est mobilisée pour défendre le droit à une retraite digne pour toutes et tous. Jeudi prochain, la mobilisation s’annonce de nouveau monstre. Dans la réforme que le Gouvernement persiste à vouloir imposer contre le pays en obligeant à travailler jusqu’à 64 ans minimum, les gros actionnaires ne cotiseraient pas un centime de plus pour financer les retraites.

Comme si ce scandale ne suffisait pas, le Gouvernement continue par ailleurs à gaver ces gros actionnaires. Il vient en effet d’autoriser une hausse moyenne de 4,75 % des péages d’autoroute au 1er février ! Or tout le monde le sait – un rapport sénatorial et la proposition de loi communiste pour la renationalisation des autoroutes l’ont clairement établi – les sociétés privées d’autoroute, au premier rang desquels Vinci et Eiffage, engrangent des profits colossaux depuis les privatisations des années 2000.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes. L’État avait tiré de ces concessions 14,8 milliards d’euros. Une somme amortie dès 2014 par les actionnaires, qui rien que sur l’année 2016 ont perçu 4,7 milliards d’euros !

D’après le Canard Enchaîné du 25 janvier dernier, un rapport commandé par le ministère de l’Économie en 2020 établirait la « rentabilité très supérieure à l’attendu » dont bénéficient Vinci et Eiffage ; un rapport que Bruno Le Maire a tenté d’enterrer, d’autant qu’il recommandait la baisse de 60% des tarifs.

Leurs dividendes scandaleux, les sociétés d’autoroute les accumulent en étranglant le pouvoir d’achat des Français, déjà en grande souffrance à cause des prix de l’énergie, de l’alimentation, des carburants. Total vient d’ailleurs d’annoncer le bénéfice le plus important de son histoire pour 2022.

 

Au moment où le pays souffre tant, les péages n’auraient jamais dû augmenter : réclamons en urgence le blocage des tarifs !

Hommage à Sadek Hadjerès

Il y a 1 mois, le 10 février 2023

Par Pierre Laurent

Ce jeudi 9 février à Malakoff, j’ai eu l’honneur de participer à un bel hommage rendu à Sadek Hadjerès, figure historique du communisme algérien, engagé toute sa vie durant contre les oppressions. Sadek, qui a passé les dernières décennies en France, nous a quitté à l’automne dernier. Voici l’intervention prononcée à cette occasion, rappelant en quelques mots qui était Sadek Hadjerès et l’ampleur de ses combats pour un monde plus juste, une Algérie libre, démocratique et en paix.

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Chers camarades et ami·es, de France et d’Algérie,

 

Je suis très honoré d’être présent aujourd’hui à vos côtés, pour rendre hommage à une grande figure du communisme algérien.

Nous avons en effet été très attristés d’apprendre, le 3 novembre dernier, le décès de notre camarade Sadek Hadjerès. Je salue l’initiative de la municipalité, de la maire Jacqueline Belhomme, des communistes de Malakoff, qui ont permis, avec d’autres, la tenue de cette soirée.

Je suis très touché de passer ce moment en compagnie de ma camarade Aliki Papadomichelaki, qui a été la compagne de Sadek et avec qui nous avons pu partager des combats communs en Grèce.

Rendre hommage à Sadek Hadjerès, c’est évoquer un véritable monument de l’histoire politique et sociale, un acteur de premier plan de toutes les luttes qui ont forgé depuis près d’un siècle la nation algérienne.

Né le 13 septembre 1928 à Larbaâ Nath Irathen, en Kabylie, Sadek est fils et petit-fils d’instituteur. Nourri d’une culture kabyle et pacifiste, il est confronté très jeunes aux brutalités coloniales. Après de brillantes études à l’université d’Alger, et parallèlement à un engagement politique et social déjà intense, il est diplômé de médecine en 1953.

Membre du Parti du Peuple Algérien (PPA) dès 1944, il le quitte en raison de désaccords sur la question berbère. Rétif à toute forme de sectarisme et de communautarisme, Sadek s’est toujours opposé à la conception  d’une Algérie réduite à l’identité arabo-musulmane.

Tout comme il s’est courageusement distancé, dès les années 1950, de la conception stalinienne de la nationalité.

Au contraire, Sadek a défendu tout au long de sa vie sa vision d’une future nation algérienne plurielle, ouverte à la diversité, fondée sur la citoyenneté civile et politique.

A la fin de l’année 1950, il adhère au Parti Communiste Algérien, dans lequel il acquiert rapidement des responsabilités. Il côtoie alors des figures telles que Fernand Iveton, Henri Maillot ou Henri Alleg. Membre du Comité Central en 1952, il dirige la revue Progrès qui jouit d’un puissant rayonnement intellectuel.

Après l’insurrection de 1954 et durant la guerre d’indépendance, il est aux côtés de Bachir Hadj-Ali à la direction du PCA. Tous deux approuvent la création de groupes de combat communistes.

Il entre en négociation, dans des conditions difficiles, avec le FLN qui refuse alors de reconnaître la présence des communistes en tant que Parti. Le démantèlement des maquis rouges conduit de nombreux communistes à intégrer l’Armée de Libération Nationale. Lors de la « Bataille d’Alger », Sadek est qualifié de « médecin pyromane » et est condamné par contumace à 20 ans de travaux forcés.

Entré dans la clandestinité après l’interdiction du PCA en 1955, dont il ne sortira qu’au moment de l’indépendance, Sadek déploie une intense activité de propagande (tracts, journaux) mais aussi de nombreux travaux intellectuels. Il fera un examen critique des retards du PCF dans l’engagement national, textes qui seront publiés dans les Cahiers du Communisme en 1958. Tout cela comptera pour faire évoluer l’appréhension des luttes coloniales par le parti communiste français.

Après l’indépendance, le PCA est à nouveau interdit en novembre 1962, mais toléré. Sadek se trouve alors en liberté provisoire.

Après le coup d’État de Boumediene en 1965, Sadek replonge dans la clandestinité pour 24 ans. Il est traqué par la police et l’armée alors qu’il poursuit, sans relâche, ses activités militantes. Après l’arrestation de Bachir Hadj-Ali, il reprend l’organisation clandestine des communistes dans le Parti de l’avant-garde socialiste (PAGS).

Il sort de la clandestinité en 1989 avec la proclamation du pluralisme politique. Un an après, il quitte son poste de secrétaire du PAGS pour se retirer en France.

Il demeurera jusqu’à la fin de ses jours un observateur attentif de la vie politique algérienne, et a d’ailleurs fortement soutenu dès 2019 le mouvement populaire du Hirak, se réjouissant de son pacifisme.

En juillet 2021, il l’évoquait d’ailleurs en ces termes :

« Dans le monde d’aujourd’hui miné par des risques planétaires communs, un atout important pour les forces de progrès et de paix en Algérie et en France, réside dans l’attachement aux valeurs stratégiques et universalistes portées par le rassemblement pacifique et indépendantiste du Hirak : l’exercice des Droits de l’Homme dans toutes leurs expressions, de l’État de droit appuyé sur la souveraineté populaire et enfin d’un système de relations internationales fondées non sur des critères identitaires, purement idéologiques mais sur un nouvel ordre international régi par la prise en compte des intérêts communs concrets des couches populaires et des États sur les deux rives de la Méditerranée. »

 

Sadek Hadjerès, qui a traversé toutes les tempêtes du siècle dernier, n’a jamais perdu espoir dans le siècle à venir, dans la perspective d’une Algérie libre, démocratique et en paix.

Figure de l’histoire algérienne, Sadek a vu sa lucidité, son courage et son abnégation, sa fidélité à ses convictions saluées par toutes les forces progressistes algériennes.

Nous en faisons de même aujourd’hui, et nous inclinons respectueusement devant sa mémoire.

 

Je vous remercie.

 

 

Seul le prononcé fait foi

Guerre en Ukraine : mon intervention au Sénat

Il y a 2 mois, le 7 février 2023

Par Pierre Laurent

Ce mardi 7 février, le Sénat a examiné une proposition de résolution « exprimant le soutien du Sénat à l’Ukraine, condamnant la guerre d’agression menée par la Fédération de Russie et appelant au renforcement de l’aide fournie à l’Ukraine ». Je suis intervenu pour exprimer la position des Sénatrices et Sénateurs de mon groupe, en faveur de la désescalade mutuelle et de la paix !

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La résolution que nous discutons arrive à un moment crucial pour l’avenir du conflit et pour celui de la paix mondiale. Hier le secrétaire général  de l’ONU s’est alarmé, je le cite, que le monde se dirige « les yeux grands ouverts » vers une « guerre plus large encore », mettant en garde contre « les risques d’escalade ». Allons-nous entendre, chers collègues, cette mise en garde ?

Il y a un an, l’agression militaire déclenchée par Vladimir Poutine a plongé dans l’horreur le peuple ukrainien, et signé le retour d’une guerre inhumaine au cœur de l’Europe.

Le bilan est d’ores et déjà effroyable : probablement plus de 300 000 victimes, tuées ou blessées, un pays durablement meurtri, des millions de réfugiés et de déplacés internes.

Vladimir Poutine croyait gagner la guerre en un éclair. La résistance de l’Ukraine, aidée par la France et l’OTAN, a changé la donne. Face à cette résistance qu’il n’attendait pas, Vladimir Poutine a choisi le pire : toujours plus de guerres, de crimes, de destructions, de violations des droits humains, d’enrôlements forcés de jeunes russes, sans compter le chantage plusieurs fois brandi de la menace nucléaire. Ce choix du pire a provoqué en riposte un armement massif de l’Ukraine.

Un an plus tard, malgré cet effrayant bilan, des moyens colossaux engagés de part et d’autre, et une ligne de front globalement figée depuis des mois, la guerre ne s’apaise pas, mais semble au contraire à l’aube d’une nouvelle escalade. Et cela en dépit du constat dressé par le général Mark Milley, chef d’état-major des armées des États-Unis le 9 novembre 2022, estimant : « il doit y avoir une reconnaissance mutuelle que la victoire n’est probablement pas réalisable par des moyens militaires », et qu’il faut donc « se tourner vers d’autres moyens ».

J’entends aussitôt la critique : admettre ce constat, ce serait être indifférent au drame ukrainien, ou pire se montrer complice de Vladimir Poutine. Le Président de la République lui-même, Emmanuel Macron, a été confronté à cette accusation larvée, quand il a tenté de maintenir ouverte la porte d’une négociation, sommé alors de rentrer dans le rang des partisans de l’escalade guerrière.

Non, chers collègues, affirmer notre soutien à l’Ukraine contre l’agression militaire de la Fédération de Russie, dénoncer les crimes de Vladimir Poutine, exiger le retrait des troupes russes et le respect de la souveraineté de l’Ukraine, aider militairement et humanitairement l’Ukraine à se défendre et à protéger sa population, c’est indispensable comme nous le disons depuis le premier jour de la guerre. Mais cela doit aller de pair avec l’impératif de prévenir une guerre généralisée et avec une mobilisation internationale de tous les instants pour stopper le conflit, pour explorer toutes les voies capables de remettre les belligérants à la table des négociations en vue du retour à la paix et à la sécurité mutuelle.

Abandonner l’objectif de la paix au seul profit de l’escalade militaire, c’est abdiquer devant la perspective d’une guerre longue et durable,  toujours plus destructrice, une guerre aux limites inconnues, chaque jour plus proche d’un basculement aux conséquences incalculables.

Ce travail est urgentissime, chers collègues. Ne voyons-nous pas s’accumuler les vents mauvais d’une guerre toujours plus large ? La Russie ne recule devant rien pour envoyer la jeunesse russe à la boucherie. Face à lui, le surarmement des pays de l’OTAN s’accélère dans des proportions inédites. Les ventes d’armes à l’international des États-Unis ont dépassé les 200 milliards de dollars, inondant l’Europe d’armes toujours plus sophistiquées. Les dirigeants polonais, pas à proprement parler des figures de la démocratie, ont augmenté leur budget militaire de 9 milliards d’euros en 2015 à 97 milliards en 2023, à grands coups d’équipements américains. Les surenchères nationalistes et les réécritures de l’histoire se propagent partout et en tous sens, excitant les haines des peuples.

Ne voyons-nous rien de tout cela, des périls encourus ? Européens ayant traversé deux guerres mondiales, avons-nous perdu la mémoire ?

Voilà pourquoi, chers collègues, nous ne voterons pas la résolution qui nous est proposée. Elle énonce des rappels de principes que nous défendons nous-mêmes face à l’agression criminelle de la Russie. Mais elle ne propose face à ce drame qu’un seul chemin de fait : l’escalade militaire clairement revendiquée par l’auteur de cette proposition de résolution Claude Malhuret. C’est le sens de l’alinéa 31. Autrement dit, après les chars lourds porteurs d’obus à uranium appauvri, des avions de chasse, demain des missiles et à chaque cran nouveau des soldats formateurs de l’Otan directement engagés. La résolution donne le feu vert au franchissement futur de toutes les lignes rouges.

Et surtout, la résolution fait l’impasse sur tout appel à une initiative de négociations et de paix. Ce n’est pas un oubli, c’est un choix, celui de la guerre comme seul chemin possible, oubliant la leçon de tous les conflits récents.

Cette résolution est une occasion manquée, celle de faire rimer solidarité avec l’Ukraine et mobilisation pour une solution de  paix. C’est cette double exigence qu’exprimera notre vote contre.

 

La vidéo de l’intervention, à retrouver sur mon compte Facebook

Le texte de la proposition de résolution, à retrouver sur le site du Sénat

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