« Dans le Nord et l’Est de la Syrie, la France doit ouvrir une nouvelle page de sa solidarité avec les Kurdes ! »

Il y a 6 mois, le 5 avril 2023
Par Pierre Laurent
Ce matin en conférence de presse au Sénat avec mes collègues Laurence Cohen, Sénatrice et Marie Pochon, Députée, nous avons rendu publique une déclaration commune à la suite de notre voyage dans le nord-est de la Syrie. Elle contient nos observations et cinq séries de recommandations concernant l’action de la France dans la région.
Notre délégation, composée de trois parlementaires (Laurence Cohen, Sénatrice du Val de Marne, Marie Pochon, Députée de la Drôme et Pierre Laurent, Sénateur de Paris), s’est rendue au Rojava et dans le nord-est syrien du 31 mars au 2 avril à l’invitation de l’AANES (Administration Autonome du Nord et de l’Est de la Syrie).
Cette visite prolonge la démarche transpartisane initiée par la tribune de 102 parlementaires français·es, publiée en juillet 2022 pour condamner les agressions militaires de la Turquie dans les zones frontalières du Nord-Est de la Syrie. Depuis des mois, ces incursions sont dirigées contre les populations kurdes, arabes, syriaques, assyro-chaldéens, turkmènes et autres communautés vivant dans la région, mais aussi contre les Forces Démocratiques Syriennes (FDS) qui ont libéré ces populations de Daech avec l’appui de la France et de la coalition internationale.
À son arrivée à Erbil (Kurdistan irakien), la délégation a rencontré le Ministre des Relations Extérieures de la région, le vice-président du Parlement de la région, et des parlementaires représentant divers partis de la coalition gouvernementale et de l’opposition.
La délégation s’est ensuite rendue dans le Nord-Est Syrien à Qamichli, Amouda, Hassaké et Raqqa. Elle a rencontré les principaux et principales représentant·es de l’AANES (Ministre des Relations Extérieures, co-président·es des Conseils exécutif et législatif, partis membres de la coalition qui a formé l’AANES) ainsi que le commandant-en-chef des FDS, Mazloum Abdi. Elle a rencontré les co-président·es de plusieurs conseils civils et exécutifs locaux dont celui de Raqqa, l’équipe dirigeante de l’association des femmes kurdes Kongra Star, et visité le camp de déplacés de Washokani qui regroupe à Hassaké 12 000 réfugiés ayant fui l’occupation turque de Serê Kaniyê.
Après tous ces entretiens et les constats faits sur place, la délégation rentre de ce voyage plus déterminée que jamais à soutenir les populations du Nord et de l’Est de la Syrie, kurdes et de toutes communautés, qui ont combattu avec courage Daech, et ont aujourd’hui besoin de plus de solidarité pour garantir la sécurité, le développement et l’avenir démocratique de la région. Tous·tes nos interlocut·eurs·rices ont salué le rôle joué par la France à leurs côtés. Tous·tes nous ont aussi demandé de faire plus.
C’est le premier appel que nous voulons lancer : la France, qui a soutenu les Kurdes dans la lutte contre Daech, doit aujourd’hui aller plus loin et ouvrir une nouvelle page de cette solidarité.
Nous avons en effet pu faire plusieurs constats, parmi lesquels :
– Les populations du Nord Est de la Syrie (kurdes, arabes, syriaques…) continuent de vivre sous une double menace : les agressions et les frappes de la Turquie et les cellules dormantes de Daech.
L’occupation illégale par l’armée turque de trois territoires frontaliers du Nord Est de la Syrie a chassé 300 000 personnes qui vivent aujourd’hui dans des camps de déplacés aux conditions dramatiquement précaires.
La prison de Hassaké, où sont retenus 12 000 anciens combattants armés de Daech et le camp de Al Hol, où sont gardés des milliers de familles daechis, femmes et enfants de 73 nationalités, sont de véritables poudrières, régulièrement ciblées par des attaques des cellules de Daech, menaçant la sécurité régionale et mondiale.
– La Turquie viole le droit international sur le partage des eaux de l’Euphrate, restreignant le débit des eaux et occupant les stations de contrôle de l’eau potable. Ajoutées à la destruction des infrastructures dues à la guerre, ces violations provoquent une crise permanente d’accès à l’eau, avec des conséquences graves en matière de santé et d’agriculture.
– Dans une situation qui reste très difficile (95 % des infrastructures de Raqqa, une ville de près d’un million d’habitants, étaient détruites à la fin des combats contre Daech), l’AANES et les conseils civils et exécutifs mis en place font des miracles pour stabiliser la situation, réussissant à associer en paix toutes les communautés présentes, et donnant une place remarquable aux femmes dans toutes les instances et leurs co-présidences. Mais les moyens sont dramatiquement insuffisants.
L’aide humanitaire et l’aide internationale à la reconstruction sont sans rapport avec les besoins et doivent radicalement changer de dimension. L’embargo ciblant Damas est de fait est imposé à l’AANES et à ses structures. Le régime déshumanisant de Bachar al-Assad qui a brisé son peuple sous les bombardements et la torture avec ses alliés russes et iraniens, tente de saisir l’opportunité du séisme pour se repositionner et retrouver une légitimité. Il profite de l’indifférence internationale pour faire porter la responsabilité exclusive de la situation aux sanctions occidentales et exige une normalisation politique.
La non-reconnaissance pleine et entière de l’AANES et de ses structures constitue une entrave majeure à la sortie de crise, alors qu’avec l’appui des FDS, elles sont les seules à même de conduire la région vers la sécurité, la reconstruction, et la stabilisation démocratique.
Fort de ces constats, nous émettons cinq séries de recommandations à l’adresse du gouvernement français, et appelons les parlementaires et les élus locaux de notre pays dans leur diversité à les soutenir activement.
1- Exiger clairement la fin des frappes truques et le retrait des troupes turques des zones du Nord et de l’Est syrien illégalement occupés. Mettre les populations déplacées de toutes communautés sous protection internationale jusqu’à leur retour. Demander une commission d’enquête internationale sur les crimes de guerre commis dans ces zones. Mettre en place un soutien humanitaire d’ampleur sous l’égide du HCR pour les populations déplacées.
2- Renforcer le soutien des forces françaises et de la coalition aux FDS dans leur lutte contre la reconstitution des cellules de Daech et leur soutien par la Turquie. Renforcer le soutien en moyens de renseignement et de protection face aux drones. Renforcer les moyens de soutien à la sécurisation des prisons et du camp d’Al Hol, mettre en place un tribunal international ad hoc pour juger les crimes de Daech, soutenir le rapatriement par les États concernés des enfants et des mères détenus, et le travail de réhabilitation de toutes les familles qui resteront sur place.
3- Condamner les violations de la Turquie concernant le droit international de l’eau. Aider à la reconstruction de réseaux d’eau potable et à la construction de traitement des eaux usées.
4- Décupler l’aide française à la reconstruction en lien avec l’AANES et ses instances, en appelant à l’amplification de l’aide européenne et internationale, en particulier dans les domaines vitaux de la santé, de l’alimentation, des routes et des ponts, de l’éducation, de la lutte et de l’adaptation contre le changement climatique.
5- Soutenir les efforts entrepris pour la création de conseils régionaux et locaux démocratiques, pluriethniques, paritaires en développant les échanges parlementaires et avec les collectivités locales. Autoriser, voire encourager, de possibles jumelages ou coopérations décentralisées.
Paris, le 5 avril 2023
Laurence COHEN, Marie POCHON, Pierre LAURENT
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